Définition de ?CHAPPE

DÉFINITIONS - REMARQUE - SYNONYME - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : a-ban-do-né

DÉFINITIONS

1
Remettre à la discrétion de.... au soin de..., céder, faire cession. Abandonner son sort à la Providence. J'ai abandonné le soin de mes affaires à un homme intelligent. Abandonner tout au vainqueur. Abandonner le reste au ciel. Abandonner cela à la fortune. Abandonner un ecclésiastique au bras séculier. Vous vous plaignez de cet homme ; je vous l'abandonne : c'est-à-dire pensez-en ce qu'il vous plaira ; faites à son égard ce que vous voudrez. Je vous abandonne ce point, je vous cède là-dessus. Il abandonne ses biens à ses créanciers.
Apprends de leurs indices L'auteur de l'attentat, et l'ordre, et les complices ; Je te les abandonne....
de Pierre CORNEILLE dans Mort de P. IV, 4
Un nombre de mots.... Que mutuellement nous nous abandonnons
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Femmes sav. III, 2
Porte aux Grecs cet enfant que Pyrrhus m'abandonne
de Jean RACINE dans Andr. III, 1
Dites au roi, Seigneur, de vous l'abandonner
de Jean RACINE dans Esth. II, 1
Au cours de mes destins j'abandonnais ma vie
de Jean-François DUCIS dans Othello, II, 7
2
Livrer à Abandonner une ville au pillage. Abandonner à la merci de.... Il abandonna la barque au courant du fleuve. Dieu abandonne souvent les méchants à leur sens réprouvé.
Nous savons à quel désespoir Judas fut abandonné de Dieu, et à quelle fin malheureuse il s'abandonna lui-même
de Louis BOURDALOUE dans Pensées, t. III, p. 368
On peut dire de certaines matières que l'Église les abandonne à nos vues particulières et à nos raisonnements
de Louis BOURDALOUE dans ib. t. II, p. 340
J'abandonnai mon âme à des ravissements....
de Pierre CORNEILLE dans Hor. I, 3
J'abandonne ce traître à toute ta colère
de Jean RACINE dans Phèd. IV, 2
Dieux ! ne puis-je à ma joie abandonner mon âme ?
de Jean RACINE dans Andr. III, 3
J'abandonnai ma vie à des malheurs certains
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Oed. V, 2
Tandis qu'à la frayeur j'abandonnais mon âme
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans ib. IV, 1
3
Renoncer à. Abandonner une bâtisse. Abandonner ce qu'on a pris. Abandonner une entreprise, une guerre commencée. Abandonner la lutte. Abandonner le barreau. Abandonner ses travaux. Abandonner une vaine tentative. Abandonner une profession. Abandonner son opinion pour celle d'un autre. J'abandonne le reste, c'est-à-dire je le passe sous silence.
Trône, à t'abandonner je ne puis consentir
de Pierre CORNEILLE dans Rod. V, I
J'avais fait serment d'abandonner plutôt la vie que de me résoudre à perdre cette liberté
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Prin. d'Él. IV, 1
La Grèce et la Sicile ont vu des citoyennes Abandonner nos lois pour ces fiers Musulmans
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Tancr. II, 4
Que je vois de sujets d'abandonner le jour !
de Jean RACINE dans Théb. V, 1
Par moi seule éloigné de l'hymen d'Octavie, Le frère de Junie abandonna la vie
de Jean RACINE dans Brit. I, 1
4
Délaisser, déserter, laisser sans secours, se séparer de.... Abandonner son général, son poste, le parti qu'on avait embrassé. Il abandonna le parti du sénat pour celui du peuple. J'abandonne la cause commune. Philoctète fut abandonné dans l'île de Lemnos. Abandonner un enfant, l'exposer et le laisser à la charité publique. Abandonner sa femme et ses enfants. Les médecins ont abandonné ce malade, c'est-à-dire ils l'ont laissé, ne sachant plus lui être utiles en rien. Avec un nom de chose pour sujet : Son courage l'abandonna. L'appétit, le sommeil l'ont abandonné.
Mon esprit, volage et sans arrêt, m'abandonne et se porte partout ailleurs
de Louis BOURDALOUE dans Pensées, t. II, p. 13
Abandonnant le corps, n'abandonnez pas l'âme
de Jean de ROTROU dans Venc. V, 4
Si vous l'abandonnez plus longtemps sans secours....
de Jean RACINE dans Brit. V, 8
Elle me dédaignait, un autre l'abandonne
de Jean RACINE dans Andr. II, 1
Tout semble abandonner tes sacrés étendards
de Jean RACINE dans Esth. Prol.
Le courage les abandonne
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. XVI
Comme un malade désespéré qu'on abandonne
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans ib. VII
5
Quitter, lâcher. Abandonner l'Italie. Abandonner Paris. Abandonner la ville pour les champs. Abandonner ses armes. N'abandonne pas le gouvernail. Tenez ferme ; n'abandonnez pas cette corde. Abandonner les étriers, les quitter et quelquefois les perdre.
Comme il avait un désir extraordinaire de s'instruire et de connaître les moeurs des étrangers, il abandonna sa patrie et tout ce qu'il avait pour voyager
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Philos. Pythag.
Il fallait en fuyant ne pas abandonner Le fer qui dans ses mains sert à te condamner
de Jean RACINE dans Phèd. IV, 2
6
Négliger, ne pas cultiver. Il ne faut pas abandonner vos liaisons dans le monde.
N'abandonnez pas votre voix
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 3
7
En fauconnerie, abandonner l'oiseau, le lâcher dans la campagne pour l'égayer.
S'ABANDONNER, v. réfl.
8
Se remettre à, se laisser aller à, se livrer à. S'abandonner à la fortune, au vainqueur, au gré de la tempête. S'abandonner au chagrin, à la douleur, à la joie, aux pleurs, à toutes sortes de plaisirs, à la débauche. Il s'abandonne sans réserve au goût de la magnificence. Personne ne s'abandonne à ce point à sa colère.
Le tout est de savoir s'abandonner à Dieu en pure foi
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Lett. Corn. 4
Mon âme à tout mon sort s'était abandonnée
de Jean RACINE dans And. IV, 5
Souffre qu'à mes transports je m'abandonne en proie
de Jean RACINE dans Théb. V, 4
Allons, à tes conseils, Phoenix, je m'abandonne
de Jean RACINE dans Andr. II, 5
Vous vous abandonniez au crime en criminel
de Jean RACINE dans Andr. IV, 5
Quoi ! tandis que Néron s'abandonne au sommeil....
de Jean RACINE dans Brit. I, 1
Télémaque s'abandonnait à une douleur amère
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. XVI
Astarbé s'abandonna à son ressentiment
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans ib. III
Il s'abandonna à l'amour des femmes
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. I, 6
Non, non, à trop de paix mon âme s'abandonne
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Sgan. 8
Ce monarque étonné à ses frayeurs déjà s'était abandonné
de Pierre CORNEILLE dans Nic. v. 8
Je connais Marianne, et sais qu'elle est trop sage Pour s'être abandonnée à tenir ce langage
de François L'Hermite, sieur du Soliers, dit TRISTAN L'HERMITE dans Marianne, I, 3
9
Perdre courage, se manquer à soi-même. Vous êtes perdu si vous vous abandonnez. Il les exhorte à ne pas s'abandonner.
10
Se négliger. Il ne faut pas s'abandonner ainsi (se négliger dans le maintien, dans l'habillement), quand on veut plaire.
11
Se lancer sans ménagement. Dans l'improvisation, cet orateur s'abandonne. L'épée à la main, il s'abandonna sur son adversaire, au risque de s'enferrer.
Plus il s'abandonnait, plus il était terrible
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Tancr. V, 1
12
Avoir de l'abandon. Ne vous roidissez pas, abandonnez-vous. Cet acteur ne s'abandonne pas assez.
13
En parlant des enfants. Il s'abandonne déjà, il commence à faire quelques pas seul et sans être soutenu.
14
En parlant des femmes, se livrer.
Elle s'est abandonnée à ceux qu'elle aimait
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Nouv. Cath.
Anne de Boulen eut l'adresse de ne se pas abandonner entièrement et d'irriter la passion du roi
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 135
Votre amour qui s'abandonne Ne refusa jamais personne
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Mac.
15
Sémantique : Terme d'équitation. Ce cheval s'abandonne, il ralentit sa marche

REMARQUE

1
Abandonner peut se construire avec à suivi d'un infinitif.
Aussi n'aurais-je pas Abandonné mon coeur à suivre ses appas
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Ec. des Mar. II, 9
Le moindre défaut des femmes qui se sont abandonnées à faire l'amour, c'est de faire l'amour
de François, duc de LA ROCHEFOUCAULD dans Réfl. 131

SYNONYME

1
1° ABANDONNER, DÉLAISSER. Abandonner se dit des choses et des personnes ; délaisser ne se dit que des personnes. Nous abandonnons les choses dont nous n'avons pas soin ; nous délaissons les malheureux à qui nous ne donnons aucun secours. Au participe, délaisser a une énergie d'universalité qu'on ne donne au premier qu'en y joignant quelque terme qui la marque précisément. Ainsi l'on dit :
C'est un pauvre délaissé ; Il est abandonné de tout le monde
de GUIZOT. dans
2
2° QUITTER, ABANDONNER, RENONCER. Idée commune, cesser de garder une chose, de s'en occuper ou de la demander.
Les thérapeutes abandonnent leurs biens à leurs parents ou à leurs amis ; ils quittent leurs pères, leurs mères ; ils renoncent à tous les attachements terrestres
de Etienne Bonnot de CONDILLAC dans

HISTORIQUE

1
XIe s.
Franceis mourront, si à nous s'abandunent
dans Ch. de Rol. LXXII
[Il] broche [pique] le bien [son cheval], le frein lui abandune
dans ib. CXV
2
XIIe s.
Or vus abandoins jo mun regne et mun païs, Estampes, Orliens, e Chartres et Paris
dans Th. le Mart. 104
3
XIIIe s.
Et le Soudan leur abandonna que il s'alassent venger de....
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 271
Et plus punis devroient estre Devant l'empereor celestre Clers qui s'abandonnent aux vices, Que les gens laiz [laïques], simples et nices
dans la Rose, 18865
Cis [celui-ci] m'abandonna le passage De la haie moult doucement
dans ib. 2806
Mais jà certes n'iert [ne sera] femme bonne, Qui, por dons prendre, s'abandonne
dans ib. 4578
Quant il sevent que lor femes s'abandonnent à autrui....
de Philippe de BEAUMANOIR dans LVII, 10
4
XIVe s.
Jà n'en seroit meilleur tant comme il fust habandonné à telles passions
de Nicolas ORESME dans Éth. 4
5
XVe s.
Elle ne vouloit mie que le roi s'abandonnast trop de la regarder
de Jean FROISSART dans I, I, 192
Ceux du chastel ne furent onques si recrus qu'ils ne s'abandonnassent au defendre si vaillamment, par quoi ceux de l'ost pussent rien gagner sur eux
de Jean FROISSART dans I, I, 259
Il n'a point de regret Au cidre qu'il nous donne ; En eust-il une tonne, Il l'abandonneroit
de BASSELIN dans 42
L'un vers l'autre desloyaument se mene ; Aux mauvais est la terre abandonnée
de DESCHAMPS dans Souffrance du peuple.
Onques sanglier escumant ni loup enragé plus fierement ne s'abandonna
dans Hist. de Boucicaut, I, 24
C'est assavoir, se le doffin [dauphin] rompoit la pais, qu'il abandonnoit à ses gens de aller servir le duc Jehan
de P. DE FENIN dans 1419
6
XVIe s.
Il y en eut deux qui abandonnerent l'entreprise de peur
de Jacques AMYOT dans Lyc. 9
Cette hardiesse et constance assurée qu'il avoit en bataille contre l'ennemy l'abandonnoit incontinent qu'il se trouvoit en une assemblée du peuple à la ville
de Jacques AMYOT dans Marius, 48
Les proprietaires les luy abandonnoient à bien vil prix
de Jacques AMYOT dans Crassus, 3
Il résolut d'abandonner sa vie [se laisser mourir]
de Jacques AMYOT dans Démétr. 52
Il seroit estrange que nous qui voulons estre tenus pour gens de bien, laississions porter par terre nostre vertu et l'abandonnissions
de Jacques AMYOT dans De la mauv. honte, 21
La meilleure part de l'entreprise, ils l'abandonnent à la fortune
de Michel de MONTAIGNE dans I, 132
Estant abandonné des medecins pour un aposteme
de Michel de MONTAIGNE dans I, 254
S'abandonner aux delices
de Michel de MONTAIGNE dans II, 4
Il abandonna [s'éloigna] de si peu son fort
de Michel de MONTAIGNE dans I, 25
Les filles se peuvent abandonner [se livrer à un homme]
de Michel de MONTAIGNE dans I, 111

ÉTYMOLOGIE

1
Abandon ; bourguig. ebandenai ; provenç. et espagn. abandonar ; ital. abbandonnare.

Synonymes de ABANDONNER

Termes proches de ABANDONNER