L'oeuvre Histoire de Napoléon et de la Grande-Armée pendant l'année 1812 de Philippe de SÉGUR

Ecrit par Philippe de SÉGUR

Date : 1826

Citations de "Histoire de Napoléon et de la Grande-Armée pendant l'année 1812"

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ALANGUIRPourquoi cette marche molle et pesante, dans une circonstance si critique ? Était-ce notre artillerie et nos bagages qui nous avaient tant alanguis ?
ALENTOURSLes alentours des bivouacs étaient jonchés des corps de plusieurs milliers de chevaux
APPLICATIONPerdu dans cet abîme de pensées désolantes, il tombe dans une si grande contention d'esprit, qu'aucun de ceux qui l'approchent n'en peut tirer une parole
CASSANT, ANTELà, au milieu des chefs rassemblés, entouré de leurs regards inquiets et qu'il suppose désapprobateurs, il semble vouloir les repousser de son attitude sévère, et d'une voix brusque, cassante et concentrée
CHÈREMENTMaison, dans une plaine rase avec sept à huit cents hommes seulement devant des milliers d'ennemis, perdit tout espoir ; déjà même il ne songeait plus qu'à gagner un bois pour vendre plus chèrement sa vie, quand....
CIRCONSTANCELa nécessité y ramena Alexandre [à Moscou].... Il y parut d'abord au milieu de la noblesse réunie ; là tout fut grand, la circonstance, l'assemblée, l'orateur et les résolutions qu'il inspira
CITERLeurs officiers étaient dignes d'eux ou le devenaient ; car, pour conserver l'ascendant de son grade sur de pareils hommes, il fallait avoir à leur montrer des cicatrices et pouvoir se citer soi-même
CLASSERQuand le génie de Napoléon, la grandeur de son élévation, l'importance de son entreprise et l'habitude de leurs anciennes relations classaient encore Bernadotte [alors roi de Suède] comme son lieutenant....
CLOAQUEIl [Napoléon] proclame que le Kremlin, arsenal, magasins, tout est détruit ; que désormais Moscou n'est plus qu'un amas de décombres, qu'un cloaque impur et malsain, sans importance politique et militaire
COLORERIl le revit [l'incendie de Moscou] dans toute sa violence ; toute cette cité lui parut une vaste trombe de feu qui s'élevait en tourbillonnant jusqu'au ciel et le colorait fortement
COLOSSEQue c'était un assez grand résultat pour y sacrifier Moscou tout entière ; que peut-être le ciel, pour leur accorder une aussi grande victoire, voulait un aussi grand sacrifice, et qu'enfin il fallait à cet immense colosse un immense bûcher
COMBATNapoléon ne se décide encore ni à rester ni à partir ; vaincu dans ce combat d'opiniâtreté, il remet de jour en jour à avouer sa défaite
COMBATTANTNapoléon, entré dans Moscou avec quatre-vingt-dix mille combattants et vingt mille malades, en sortait avec plus de cent mille combattants
COMBATTRELes chefs et Mortier lui-même, vaincus par l'incendie qu'ils com battaient depuis trente-six heures, y vinrent [au Kremlin] tomber d'épuisement et de désespoir
COMBUSTIONC'était l'instant où ces flammes furieuses étaient dardées de toutes parts et avec le plus de violence sur le Kremlin ; car le vent, sans doute attiré par cette grande combustion, augmentait à chaque instant d'impétuosité
COMMANDERCes chefs fiers et du même âge, compagnons de guerre.... n'étaient guère propres à se commander l'un à l'autre
COMMENTAIREAlors l'ennui de six mois d'hiver, qui l'aurait retenu sur ces fleuves [la Düna et le Borysthène], lui paraissait son plus grand ennemi, et, pour le combattre, cet autre César y eût dicté ses commentaires
COMPACTELes charges vigoureuses et réitérées de ce régiment contre le flanc gauche de cette masse compacte furent insuffisantes
COMPLAISANCELe souvenir des complaisances d'Alexandre à Tilsitt et à Erfurt confirma l'empereur de France dans cette fausse opinion
CONCENTRÉ, ÉEUn fait certain, c'est qu'en quittant son beau-frère, les traits de Murat portaient l'empreinte d'un profond chagrin ; ses mouvements étaient brusques, une violence sombre et concentrée l'agitait
CONCENTRERPendant qu'on s'appelle, qu'on regarde et qu'on se concentre dans celui de ces deux hameaux qui était le plus près du Borysthène, des milliers de cosaques sortent d'entre tous les arbres
CONFIDENT, ENTEDuroc, le plus réservé de tous, l'ami, le confident de l'empereur, disait hautement qu'il ne prévoyait pas d'époque à notre retour
CONJURATIONPlatof [général des cosaques] a dit lui-même qu'à cette affaire un officier fut blessé près de lui, ce qui le surprit peu ; mais qu'il n'en fit pas moins fustiger devant tous ses cosaques le sorcier qui l'accompagnait, l'accusant hautement de paresse pour n'avoir pas détourné les balles par ses conjurations, comme il en était expressément chargé
CONQUÉRIRL'empereur écoute encore ; le bruit augmente ; est-ce donc une bataille, s'écrie-t-il ? Chaque décharge le déchire ; car il ne s'agissait plus pour lui de conquérir, mais de conserver
CONSERVATEUR, TRICEIl vaut mieux menacer ces provinces et laisser aux Russes quelque chose à perdre pour les décider à une paix conservatrice
CONTEMPLATIONIl le revoit [l'incendie de Moscou] dans toute sa violence ; toute cette cité lui parut une vaste trombe de feu.... absorbé par cette funeste contemplation, il ne sortit d'un morne et long silence que pour s'écrier : ceci nous présage de grands malheurs
CONTRACTÉ, ÉEAlors on voyait la figure de ces guerriers [les Russes] contractée par une douleur sauvage, et le feu de leurs regards sombres et menaçants répondre à ces feux [l'incendie de Moscou] qu'ils croyaient notre ouvrage
CONVOISur cette route [de Moscou] deux convois considérables venaient de tomber au pouvoir de l'ennemi : l'un, par la négligence de son chef, qui se tua de désespoir ; l'autre, par la lâcheté d'un officier qu'on allait punir quand la retraite commença
CONVULSIVEMENTIl [Napoléon] marche convulsivement, il s'arrête à chaque croisée [du Kremlin], et regarde le terrible élément victorieux dévorer avec fureur sa brillante conquête [Moscou]
CORPSSes ordres de mouvement avaient été exécutés avec une telle précision, que tous ces corps, partis du Niémen à des époques et par des routes différentes, malgré des obstacles de tout genre, après un mois de séparation et à cent lieues du point où ils s'étaient quittés, se trouvèrent à la fois réunis à Beszenkowiczi, où ils arrivèrent le même jour et à la même heure
CORPSChaque corps ennemi qui se présenta sur nos flancs comme assaillant fut assailli ; la cavalerie fut refoulée dans le bois, et l'infanterie rompue à coups de sabre
CORRUPTEUR, TRICEIl laissait Barclay faire aux soldats français et à leurs alliés ces adresses corruptrices qui avaient tant ému Napoléon
COSAQUEL'empereur regardait et souriait, s'avançant toujours et croyant à une terreur panique ; ses aides de camp soupçonnaient des cosaques ; mais ils les voyaient marcher si bien pelotonnés qu'ils en doutaient encore ; et, si ces misérables n'eussent pas hurlé en attaquant, comme ils le font tous pour s'étourdir sur le danger, peut-être que Napoléon ne leur eût pas échappé
CÔTOYERCe jour-là même, une autre route nous amenait Kutusof ; il la couvrait tout entière avec quatre-vingt-dix mille hommes ; il côtoyait, il dépassait Napoléon
COUPL'hiver était si près de nous, qu'il n'avait fallu qu'un coup de vent de quelques minutes pour l'amener âpre, mordant, dominateur
COUPÉ, ÉEIl annonce que la première ligne de Murat a été surprise et culbutée, sa gauche tournée à la faveur des bois, son flanc attaqué, sa retraite coupée
COUPERDepuis, les Russes ont reproché à Napoléon de ne s'être point décidé à cette manoeuvre ; mais ont-ils assez songé qu'aller ainsi se placer par delà un fleuve, une ville forte et une armée ennemie, c'eût été, pour couper aux Russes le chemin de leur capitale, se faire couper à soi-même toute communication avec ses renforts, ses autres armées et l'Europe ?
COUPOLECette capitale, justement nommée par ses poëtes Moscou aux coupoles dorées
COUREUR, EUSEPendant ces événements, Davoust, au sud de Vilna, avait entrevu quelques coureurs de Bagration, qui déjà cherchait avec inquiétude une issue vers le nord
COURONNERLes généraux d'artillerie, qui s'étonnaient aussi de leur stagnation, profitèrent promptement de la permission de combattre qu'on venait de leur donner ; ils couronnèrent bientôt les crêtes
COURT, COURTECette religion de l'esprit, tout intellectuelle et morale, ils l'ont faite toute physique et matérielle, pour la mettre à leur brute et courte portée
COURT, COURTEL'engagement fut d'abord vif, mais il tourna court ; l'avant garde russe se retira précipitamment derrière le ravin
COUVRIRKutusof, plus confiant dans ses canons que dans ses soldats, ne cherchait à vaincre que de loin ; ses feux couvraient tellement tout le terrain occupé par les Français, que le même boulet qui renversait un homme du premier rang allait tuer sur les dernières voitures les femmes fugitives de Moscou
COUVRIREn même temps que sur son flanc droit le maréchal se fait un rempart de ces malheureux, il a regagné les bords du Dniéper, dont il couvre son flanc gauche, et il marche entre deux s'avançant ainsi de bois en bois, de plis de terrain en plis de terrain, profitant de toutes les sinuosités, des moindres accidents du sol
CRAMPONPourquoi tant de soldats déjà morts de faim et de froid sous le poids de leurs sacs, chargés d'or au lieu de vivres et de vêtements, et surtout si trente-trois journées de repos n'avaient pas suffi pour préparer aux chevaux de cavalerie, de l'artillerie et à ceux des voitures, des fers à crampon qui eussent rendu leur marche plus sûre et plus rapide ?
CRAQUEMENTLe bruit sourd et monotone de nos pas, le craquement de la neige, et les faibles gémissements des mourants interrompaient seuls cette vaste et lugubre taciturnité
CRÉATIONCe maréchal [Bessières] devait son élévation à d'honorables services et à l'affection de l'empereur, qui s'était attaché à lui comme à sa création
CRÉDULECrédule par espoir, par désespoir peut-être, il s'enivre quelques instants de cette apparence [de négociations], et, pressé d'échapper au sentiment intérieur qui l'oppresse, il semble vouloir s'étourdir en s'abandonnant à une joie expansive
CRÉDULEPartouneaux crut à cette fausse nouvelle ; car, en fait de malheurs, l'infortune est crédule
CREUSERAinsi tout ce qui pouvait tourner à sa perte, tournerait à sa gloire ; cette journée [l'entrée à Moscou] allait commencer à décider s'il était le plus grand homme du monde ou le plus téméraire ; enfin s'il s'était élevé un autel ou creusé un tombeau
CREUSERLes premiers canons qui se présentèrent atteignirent l'autre rive ; mais de moment en moment l'eau s'élevait, en même temps que le gué se creusait sous les roues et sous les efforts des chevaux ; un chariot s'engrava, d'autres s'y arrêtèrent, et tout fut arrêté
CREVASSEIls s'emportèrent au loin dans la plaine haute et voulurent s'emparer des canons ennemis, mais une des crevasses profondes dont le sol russe est sillonné les arrêta sous un feu meurtrier
CRINIÈRELes officiers russes nous montraient ces chevaux d'un aspect encore sauvage, à peine domptés, et dont la longue crinière balayait la poussière de la plaine
CRITIQUEUn entretien digne de remarque qu'on entendit cette même nuit montrera tout ce qu'avait de critique sa position, et comment il la supportait
CROISERIls parcouraient tumultueusement la ville, cherchant les uns des vivres, d'autres des fourrages, quelques-uns des logements ; on se croisait, on s'entre-choquait, et, l'affluence augmentant à chaque instant, ce fut bientôt comme un chaos
CROÎTRECe retard donnait aux moissons nouvelles des Russes le temps de croître ; elles nourriront sa cavalerie [de Napoléon] ; son armée traînera moins de transports à sa suite
CROIXIl fallut de longs efforts pour arracher à la tour du Grand-Yvan [au Kremlin] sa gigantesque croix ; l'empereur voulait qu'à Paris le dôme des Invalides en fût orné
CRUEL, ELLEDans cette guerre à mort, leur donner la vie [aux prisonniers], c'eût été se sacrifier soi-même ; on fut cruel par nécessité ; le mal venait de s'être jeté dans une si terrible alternative
CRUELLEMENTEnfin on atteignit Gjatz avec la nuit ; mais cette première journée d'hiver avait été cruellement remplie ; l'aspect du champ de bataille, de ces deux hôpitaux abandonnés, cette multitude de caissons livrés aux flammes, ces Russes fusillés....
CUIRASSIERLe roi lui montre le nouveau flanc de l'ennemi : il faut l'enfoncer jusqu'à la hauteur de la gorge de leur grande batterie ; là, pendant que la cavalerie légère poussera son avantage, lui, Caulaincourt, tournera subitement à gauche avec ses cuirassiers, pour prendre à dos cette terrible redoute, dont le front écrase encore le vice-roi
CULBUTERCaulaincourt répondit : vous m'y verrez tout à l'heure mort ou vif ; il part aussitôt et culbute tout ce qui lui résiste ; puis, tournant subitement à gauche avec ses cuirassiers, il pénètre le premier dans la redoute sanglante où une balle le frappe et l'abat
CURÉEPour recueillir les restes de Moscou, dont l'incendie n'a que trop légitimé le pillage, et pour arracher les soldats à cette grande curée
DANGERIl [Napoléon] donne ordre qu'on laisse toujours sur sa table le résumé qui l'éclaire sur les dangers de sa position
DANGEREUX, EUSEPendant que Davout jouissait peut-être du dangereux plaisir d'avoir humilié son ennemi [Berthier], l'empereur se rendait à Dantzick, et Berthier, plein de vengeance, l'y suivait
DARDERC'était l'instant où ces flammes furieuses étaient dardées de toutes parts et avec le plus de violence sur le Kremlin ; car le vent, sans doute attiré par cette grande combustion, augmentait d'impétuosité
DATERAppréciant toute la force qu'il [l'empereur] tire du prestige de son infaillibilité, il frémit d'y porter une première atteinte ; quelle effrayante suite de guerres périlleuses dateront de son premier pas rétrograde !
DÉBÂCLELes premiers qui s'éloignent du bord avertissent que la glace plie sous eux, qu'elle s'enfonce, qu'ils marchent dans l'eau jusqu'aux genoux ; et bientôt on entend ce frêle appui se fendre avec des craquements effroyables qui se prolongent au loin comme dans une débâcle
DÉBANDÉ, ÉEDepuis la veille, quatre mille traîneurs et trois mille soldats étaient morts ou égarés, les canons et tous les bagages perdus ; à peine restait-il à Ney trois mille combattants et autant d'hommes débandés
DÉBANDERLe 27 décembre, à la fin d'une marche de dix heures, ces Prussiens aperçurent la brigade russe ; sans reprendre haleine, ils la chargent, la débandent et lui arrachent deux bataillons
DÉBARRASSERIl ne fallait sans doute que l'embarras d'un défilé, quelques marches forcées ou une boutade de cosaques, pour nous débarrasser de tout cet attirail [les bagages de l'armée sortant de Moscou] ; mais le sort ou l'ennemi avaient seuls le droit de nous alléger ainsi
DÉBATTREOn ne lui répondit pas [à l'empereur] ; il était évident qu'il ne cherchait pas de conseils ; on voyait qu'il s'était tout dit à lui-même, qu'il se débattait contre ses propres réflexions, et que, par ce torrent de conjectures, il cherchait à s'en imposer et s'efforçait d'entraîner ainsi dans ses illusions les autres et lui-même
DÉBORDERDéjà, à sa gauche et a sa droite, il [Napoléon] voyait le prince Eugène et Poniatowski déborder la ville ennemie [Moscou]
DÉBOUCHÉNapoléon, avec environ six mille gardes et le corps de Ney réduit à six cents hommes, passait la Bérézina, vers deux heures de l'après-midi ; il se plaçait en réserve d'Oudinot et assurait contre les efforts à venir de Tchitchakof le débouché des ponts
DÉBRISÀ cela Davoust répliquait par son horreur naturelle pour toute espèce de désordre : elle l'avait d'abord porté à vouloir régulariser cette fuite ; il s'était efforcé d'en couvrir les débris, craignant la honte et le danger de laisser à l'ennemi ces témoins de notre désastre
DÉCHARGECependant l'empereur écoute encore ; le bruit augmente : Est-ce donc une bataille ? s'écrie-t-il ; chaque décharge le déchire, car il ne s'agissait plus pour lui de conquérir, mais de conserver
DÉCHIRERCependant les trois cents Français que déchire la mitraille, persévèrent ; déjà ils atteignaient la position ennemie....
DÉCHU, UEQui de nous ignore que, du sein de son obscurité, les regards de l'homme déchu se tournent involontairement vers l'éclat de son existence passée ?
DÉCIDÉ, ÉEIl laissa Mortier et la jeune garde à une lieue derrière lui, tendant ainsi de trop loin une main trop faible à son armée, et décidé à l'attendre
DÉCIDERTrois cents soldats, formés en trois troupes, furent les seuls qu'on put décider à monter à cet assaut ; on vit ces hommes dévoués s'avancer résolûment contre des milliers d'ennemis, sur une position formidable
DÉCIDERKutusof le joue, il [Napoléon] le sent, mais il se trouve engagé si avant qu'il ne peut plus ni avancer, ni rester, ni reculer, ni combattre avec honneur et succès ; ainsi, tour à tour poussé par tout ce qui décide ou détourne, il demeure sur ces cendres [de Moscou], espérant à peine, désirant toujours
DÉCIDERLà sont les sources des rivières qui versent leurs eaux dans les mers Noire et Baltique ; mais le sol y est lent à décider leur pente et leur courant ; de sorte que les eaux y séjournent et inondent au loin le pays
DÉCISIONDaru, comme ses autres officiers, s'étonne de ne point retrouver en lui [Napoléon] cette décision vive, mobile et rapide comme les circonstances
DÉCISIONToutefois ce n'était qu'entre soi qu'on s'épanchait ainsi ; car on sentait que, la décision prise, tous devaient concourir à son exécution, que plus la position devenait périlleuse, plus il y fallait de courage
DÉCLARERNapoléon satisfait se déclare : Soldats, dit-il, la seconde guerre de Pologne est commencée
DÉCLARERLe 6 novembre, le ciel se déclare ; son azur disparaît ; l'armée marche enveloppée de vapeurs froides ; ces vapeurs s'épaississent ; bientôt c'est un nuage immense qui s'abaisse et fond sur elle en gros flocons de neige
DÉCOLORÉ, ÉECe fut le 14 novembre que la colonne impériale sortit enfin de Smolensk ; sa marche était encore décidée, mais morne et taciturne comme la nuit, comme cette nature muette et décolorée au milieu de laquelle elle s'avançait
DÉCOMBRESIls [les Russes] ne nous ont laissé que des décombres [à Moscou], mais nous y sommes tranquilles
DÉCONSIDÉRERPuis il s'écrie qu'en politique il ne faut jamais reculer, ne jamais revenir sur ses pas ; se bien garder de convenir d'une erreur ; que cela déconsidère ; que, lorsqu'on s'est trompé, il faut persévérer ; que cela donne raison
DÉCONTENANCERIl devait lui dire [à l'empereur] que, dès Malo-Iaroslavetz, le premier mouvement de retraite, pour des soldats qui n'avaient jamais reculé, avait décontenancé l'armée
DÉCORATIONIl fut magnifique dans ses récompenses ; les 12e, 21e, 27e de ligne, et le 7e léger reçurent quatre-vingt-sept décorations et des grades
DÉCOUVRIRLe grand écuyer ne répondit rien ; il ne se retira pas ; seulement il se découvrit à demi pour remercier et refuser
DÉCROISSANCEIls répètent entre eux, en voyant ce génie opiniâtre et inflexible lutter contre l'impossibilité, que, parvenu au faîte de sa gloire sans doute, il pressent que de son premier mouvement rétrograde datera sa décroissance
DÉDAIGNERNapoléon dédaigna d'attribuer ce mécompte à l'habileté du général ennemi ; il s'en prit aux siens ; déjà il sentait que sa présence était partout nécessaire, ce qui la rendait partout impossible
DÉDOMMAGEMENTCette ville où ses soldats devaient enfin trouver un abri, des vivres, une riche proie, dédommagements promis à tant de maux
DÉFECTIONQuand Napoléon apprit cette nouvelle [la capitulation du général Partouneaux], saisi de douleur, il s'écria : Faut-il donc, lorsque tout semblait sauvé comme par miracle, que cette défection vienne tout gâter ? L'expression était impropre, mais la douleur la lui arracha
DÉFENDREQue si Barclay l'a prévenu dans cette capitale [Vitepsk], sans doute il voudra la défendre ; là peut-être l'attendait cette victoire tant désirée, qui vient de lui échapper sur la Vilia
DÉFENDREOn s'y défendit comme des vainqueurs se défendent, en attaquant
DÉFENDU, UE,Davoust choisit un terrain haut, défendu par un ravin et resserré entre deux bois
DÉFENSELa cavalerie française eut l'honneur de cette journée ; l'attaque y fut aussi acharnée que la défense opiniâtre ; elle eut plus de mérite, n'ayant à employer que le fer contre le fer et le feu
DÉFENSIF, IVEQuelques-uns virent dans ces proclamations [de l'empereur Alexandre et de l'empereur Napoléon] la différence des deux peuples, des deux souverains et de leur position mutuelle ; en effet, l'une, défensive, fut simple et modérée ; l'autre, offensive, pleine d'audace et respirant la victoire
DÉFENSIF, IVEÀ Vitepsk, c'est l'ennui, c'est toute la dépense, ce sont tous les inconvénients, toutes les inquiétudes d'une position défensive qu'il considère ; à Moscou, c'est la paix, l'abondance, les frais de la guerre et une gloire immortelle
DÉFILÉLa position qu'il occupe en avant d'un défilé est dangereuse et nécessite un mouvement rétrograde
DÉFONCERNey accourut ; il lança tout sur le flanc de cette colonne russe ; Doumerc et sa cavalerie, qui la défoncèrent, lui prirent deux mille hommes
DÉGAGERNapoléon se dégagea en silence de l'immense attirail qu'il entraînait après lui, et s'avança sur la vieille route de Kalougha
DÉGARNIRChaque matin il fallait que nos soldats allassent au loin chercher la nourriture du soir et du lendemain ; et, comme les environs de Moscou se dégarnissaient de plus en plus, on s'écartait tous les jours davantage
DÉGORGEMENTLe dégorgement de cette foule par un étroit passage devint presque impossible
DÉGOÛTERLe choc fut terrible ; tout fut reconquis une quatrième fois, et tout fut perdu de même ; plus ardents que leurs anciens pour commencer, ils [de jeunes soldats] se dégoûtèrent plus tôt et revinrent en fuyant sur les vieux bataillons qui les soutinrent
DÉLAVERDans ces contrées les neiges séjournent longtemps sur les terres ; elles filtrent au travers de leurs parties les moins solides, qu'elles pénètrent profondément, qu'elles délavent et effondrent
DÉLIBÉRERLe temps de délibérer était passé, et celui d'agir enfin venu ; le 9 mai 1812, Napoléon, jusque-là toujours triomphant, sort d'un palais où il ne devait plus rentrer que vaincu
DÉMEMBRERIl sentait ses forces s'affaiblir, et craignait qu'après lui cet empire français, ce grand trophée de tant de travaux et de victoires, ne fût démembré
DÉMOLIRL'aide de camp répondit qu'il y faudrait la garde pour achever : Non, reprit Napoléon, je m'en garderai bien, je ne veux pas la faire démolir, je gagnerai la bataille sans elle
DÉMONSTRATIONLe vice-roi s'apercevait que la plupart de ces Moscovites, attirés par ses démonstrations, s'étaient portés à la gauche de la route
DÉMONTÉ, ÉENapoléon rallie ses corps d'armée ; les revues qu'il passe dans le Kremlin sont plus fréquentes ; il réunit en bataillons tous les cavaliers démontés
DÉNATURERParmi ceux-là [les soldats qui s'endurcirent aux excès], quelques vagabonds se vengèrent de leurs maux jusque sur les personnes ; au milieu de cette nature ingrate ils se dénaturèrent
DÉNOÛMENTPuis s'appesantissant, ils le voyaient passer ses longues heures à demi couché, comme engourdi, et attendant, un roman à la main, le dénoûment de sa terrible histoire
DÉNÛMENTLa route avait détruit leur chaussure.... ils cachaient avec soin leur dénûment devant leur empereur et se paraient de leurs armes éclatantes et bien réparées
DÉPASSERL'empereur s'était arrêté à Lyadi, à quatre lieues du champ de bataille ; la nuit venue, il apprend que Mortier, qu'il croit derrière lui, l'a dépassé
DÉPÈCEMENTDéjà même, avant l'entrevue d'Erfurt, quand Sébas ani était revenu de Constantinople, quoique Napoléon parût tenir encore à ce dépècement de la Turquie d'Europe....
DÉPLACERComme ils connaissent toute son anxiété, ils admirent la force de son génie et la facilité avec laquelle il déplace et fixe où il lui plaît toute la puissance de son attention
DÉPLOYERIl envisage aussitôt et le mal et le remède : il s'arrête, fait volte-face, déploie ses divisions à droite du grand chemin, et contient dans la plaine les colonnes russes qui cherchaient à lui faire perdre cette route
DÉPOUILLEDe Gjatz à Mikalewska, village entre Dorogobouje et Smolensk, il n'arriva rien de remarquable dans la colonne impériale, si ce n'est qu'il fallut jeter dans le lac de Semlewo les dépouilles de Moscou : des canons, des armures gothiques, ornements du Kremlin, et la croix du grand Yvan y furent noyés
DÉPOUILLERQuand il sut.... que les paysans russes.... qu'il faisait payer généreusement afin d'en attirer d'autres, étaient dépouillés de ces vivres qu'ils nous apportaient, par nos soldats affamés....
DÉPOUILLERL'inquiétude dont il était ressaisi se décelait par des ordres de colère ; ce fut alors qu'il fit dépouiller les églises du Kremlin de tout ce qui pouvait servir de trophée à la grande armée
DERNIER, IÈRELes dernières levées étaient trop jeunes et trop faibles, il est vrai ; mais l'armée avait encore beaucoup de ces hommes forts et tout d'exécution, accoutumés aux situations critiques et que rien n'étonnait
DÉROULERPendant que cette catastrophe s'accomplissait [à la Bérézina], les restes de la grande armée ne formaient plus sur l'autre rive qu'une masse informe qui se déroulait confusément en s'écoulant vers Zembin
DÉROUTEMais sans doute l'empereur croit, en datant cinq jours de cette ville, donner à une déroute l'apparence d'une lente et glorieuse retraite
DERRIÈREC'est à cent lieues plus loin que Smolensk, dans une position plus resserrée, derrière les marais de la Bérézina, c'est à Minsk qu'il lui faut aller chercher des quartiers d'hiver dont quarante marches le séparent
DERRIÈREÀ la vue de Krasnoé, les troupes de ce maréchal se débandèrent et coururent à travers champs, pour dépasser la droite de la ligne ennemie, par derrière laquelle elles arrivaient
DÈSCe grand sacrifice était déjà commencé dès Smolensk ; Rostopchine l'acheva
DÉSAPPROUVERDepuis, sa conduite désavoua sans désapprouver
DÉSASTREUne vaste flamme s'élevait en tourbillonnant, couvrait Smolensk et la dévorait tout entière avec un sinistre bruissement ; un si grand désastre, qu'il crut son ouvrage, effraya le comte de Lobau
DÉSAVOUERQuelques-uns pensent qu'aucun homme dans tout l'empire, hors l'empereur, n'aurait osé se charger d'une si terrible responsabilité [l'incendie de Moscou] ; depuis, sa conduite désavoua sans désapprouver
DÉSENCOMBREROn vit de toutes parts arriver à l'entrée du pont, auquel l'armée russe était adossée, la cavalerie, les canons, les voitures et les bataillons.... on fut plusieurs heures à pouvoir désencombrer et faire dégorger ce passage
DÉSERTSes sorties journalières [de Napoléon], qu'éclairait toujours un soleil brillant, dans lequel il s'efforçait de voir et de montrer son étoile, ne le distrayaient point ; au triste silence de Moscou morte se joignait celui des déserts qui l'environnent, et le silence encore plus menaçant d'Alexandre
DÉSESPOIRCes détails transportèrent de joie Napoléon : crédule par espoir, par désespoir peut-être, il s'enivre quelques instants de cette apparence, et, pressé d'échapper au sentiment intérieur qui l'oppresse, il semble vouloir s'étourdir en s'abandonnant à une joie expansive
DÉSOLANT, ANTEPerdu dans cet abîme de pensées désolantes, il [l'Empereur] tombe dans une si grande contention d'esprit qu'aucun de ceux qui l'approchent n'en peut tirer une parole
DÉSORGANISATIONQuant à la faiblesse et à la désorganisation de l'armée ennemie, personne n'y croyait
DESPOTIQUEMENTToutes ces passions qui gouvernent si despotiquement les autres hommes étaient de trop faibles mobiles pour un génie aussi ferme et aussi vaste
DESSERRÉ, ÉEChaque matin les régiments partaient en ordre de leurs bivouacs ; mais dès les premiers pas leurs rangs desserrés s'allongeaient en files lâches et interrompues
DESSUSC'est ainsi que dix-huit mille Italiens et Français, ramassés au fond d'un ravin, ont vaincu cinquante mille Russes placés au-dessus de leurs têtes et secondés par tous les obstacles que peut offrir une ville bâtie sur une pente rapide
DESTINATIONLe plus grand désordre y régnait ; de nombreuses colonnes de cavalerie, d'infanterie, d'artillerie, s'y présentaient de tous côtés ; elles se disputaient le passage ; chacun, irrité par la fatigue et la faim, était impatient d'arriver à sa destination
DESTRUCTIONEnfin [sous le feu de l'artillerie française] les Russes s'arrêtèrent, n'osant avancer davantage et ne voulant pas reculer, soit qu'ils fussent saisis et comme pétrifiés d'horreur au milieu de cette grande destruction, ou que dans cet instant Bagration ait été blessé
DÉTRESSESa détresse [de Napoléon à Moscou] augmente : il sait qu'il ne doit pas compter sur l'armée prussienne ; un avis d'une main trop sûre, adressé à Berthier, lui fait perdre sa confiance dans l'appui de l'armée autrichienne
DÉVORERLes flammes qui dévoraient avec un bruissement impétueux les édifices entre lesquels il [Napoléon à Moscou] marchait, dépassant leur faîte, fléchissaient alors sous le vent et se recourbaient sur nos têtes
DÉVOUEMENT, ou comme quelques-uns écrivent, dit l'Académie, DÉVOÛMENTIls n'ont point laissé sans punition ce crime solitaire au milieu de mille dévouements d'une tendresse sublime
DICTERL'empereur, ne pouvant plus douter de la bataille, rentra dans sa tente pour en dicter l'ordre
DIFFORMITÉLes Russes, de leurs collines, virent tout l'intérieur de l'armée, ses faiblesses, ses difformités, ses parties les plus honteuses, tout ce que d'ordinaire on cache avec le plus de soin
DIRECTIONNapoléon se dégagea en silence de l'immense attirail qu'il entraînait après lui, et s'avança sur la vieille route de Kalougha ; il poussa dans cette direction pendant quelques heures, annonçant qu'il allait vaincre Kutusof sur le champ même de sa victoire
DISLOCATIONMurat profita de cette incertitude pour s'arrêter plusieurs jours à Gumbinen et pour diriger sur les différentes villes qui bordent la Vistule les restes des corps ; au moment de cette dislocation de l'armée il en réunit les chefs
DISPERSIONLa dispersion des corps d'armée étant indispensable pour qu'ils pussent trouver des subsistances dans ces déserts, cette nécessité tenait Napoléon loin des siens
DISPOSITIONSoit qu'une première disposition échouant, leurs généraux n'en sussent pas changer
DISPUTERPendant que nos soldats luttaient encore avec l'incendie et que l'armée disputait au feu cette proie [Moscou]
DISSÉMINERAinsi, l'empereur, fatigué, souffrant, accablé de trop de soins de toute espèce, et forcé à des ménagements pour ses lieutenants, disséminait le pouvoir comme ses armées, malgré ses préceptes et ses anciens exemples
DISSERTERPrès de lui [un général], des officiers d'armes savantes dissertaient encore.... dans notre siècle, que quelques découvertes encouragent à tout expliquer, ceux-là, au milieu des souffrances aiguës que leur apportait le vent du nord [en Russie, dans l'hiver de 1812], cherchaient la cause de cette constante direction
DISTENDREDans ce mouvement nocturne, silencieux, à travers champs, d'une colonne composée d'hommes affaiblis, de blessés et de femmes avec leurs enfants, on n'avait pu marcher assez serrés pour ne pas se distendre, se désunir et perdre dans l'obscurité la trace les uns des autres
DIVERSEMENTLes Russes parlent diversement de leur général et de leur empereur ; pour nous, comme ennemis, nous ne pouvons juger nos ennemis que par les faits ; or telles furent leurs paroles, et leurs actions y répondirent
DIVISIONLes soldats de Ney et ceux de la division Gudin, veuve de son général, y étaient rangés sur les cadavres de leurs compagnons et sur ceux des Russes, au milieu d'arbres à demi brisés, sur une terre battue par les pieds des combattants
DOMINATEUR, TRICEÀ sa gauche [d'une redoute] et à portée de son feu, un mamelon s'élève comme le dominateur de cette plaine, il est couronné d'une redoute formidable
DOMINATEUR, TRICELa grande armée conserva son air de souveraine ; vaincue par les éléments, elle garda devant les hommes ses formes victorieuses et dominatrices
DONNÉ, ÉEQu'est-ce que la guerre ? un métier de barbares, où tout l'art consiste à être le plus fort sur un point donné
DONNERUn régiment, trompé par l'obscurité, dépassa la première ligne, et alla donner tout au milieu des cuirassiers russes, qui l'assaillirent et le mirent en désordre
DORÉ, ÉEÀ la vue de cette ville dorée [Moscou, dont les coupoles étaient dorées], de ce noeud brillant de l'Asie et de l'Europe, de ce majestueux rendez-vous où s'unissaient le luxe, les usages et les arts des deux plus belles parties du monde, nous nous arrêtâmes....
DORMIRLa nuit finissait, il était quatre heures, tout dormait encore dans les bivouacs de Delzons, hors quelques sentinelles, quand tout à coup....
DOUX, DOUCELe 23, le quartier impérial était à Borowsk ; cette nuit fut douce pour l'empereur [qui se crut maître de la route de sa retraite hors de Moscou]
DOUX, DOUCEDans la Lithuanie plus anciennement réunie, où une administration douce, des faveurs habilement distribuées et une plus longue habitude avaient fait oublier l'indépendance
DRAGONIl [l'Empereur] sentait des bandes de Cosaques rôder sur les flancs et derrière lui : cent cinquante dragons de sa vieille garde ne venaient-ils pas d'être rencontrés, assaillis, écrasés par une foule de ces barbares ?
DRAPEAUJusque-là le 127e avait marché sans aigle ; car alors il fallait conquérir son drapeau sur le champ de bataille, pour prouver qu'ensuite on saurait l'y conserver
ÉBAUCHÉ, ÉEOn s'attendait à une bataille ; le terrain s'y prêtait ; des ouvrages étaient ébauchés, mais tout avait été abandonné et l'on n'éprouvait pas la plus légère résistance
ÉBRANLERIl fallut qu'un Italien, le colonel Delfanti, s'élançât le premier ; alors les soldats s'ébranlèrent, et la foule suivit
ÉCARTIl [l'Empereur] s'attacha à leur persuader l'utilité, la justice et la nécessité de cette guerre [la guerre de Russie] ; mais l'un d'eux surtout l'interrompait avec impatience ; car, dès qu'une discussion était établie, Napoléon en souffrait les écarts
ÉCHARPEL'artillerie russe, supérieure en nombre, manoeuvrait au galop ; elle prenait en écharpe et en flanc nos lignes qu'elle abattait
ÉCHAUFFOURÉEIl venait de se passer, non loin de là, une échauffourée sur laquelle Murat se taisait ; notre avant-garde avait été culbutée....
ÉCHECPourquoi sortirait-il d'une situation brillante, quoique non assurée, pour se jeter dans une situation si critique où le moindre échec pouvait tout perdre, où tout revers serait décisif ?
ÉCHELONQuelques postes militaires placés dans quatre villes en cendre ne suffisaient pas pour garder une route de quatre-vingt-treize lieues ; car on n'avait pu établir que quelques échelons, toujours trop espacés sur une si longue échelle
ÉCHIQUIERL'empereur alors dit à Belliard que rien n'était encore assez débrouillé ; que, pour faire donner ses réserves, il voulait voir plus clair sur son échiquier
ÉCLAIRERPendant que Ney attaquait, Murat éclairait ses flancs avec sa cavalerie
ÉCLAIREUREnfin une dernière hauteur reste à dépasser ; elle touche à Moscou, qu'elle domine ; c'est le Mont du Salut ; nos éclaireurs l'eurent bientôt couronné
ÉCOULEMENTIl y avait, à l'issue du pont, sur l'autre rive, un marais où beaucoup de chevaux et de voitures s'étaient enfoncés, ce qui embarrassait encore et retardait l'écoulement
ÉCOULER (S')Enfin, avant minuit, cet amas de troupes s'écoula vers Ostrowno ; au tumulte le plus effroyable succéda le plus profond silence
ÉCOUTEREn ce moment, aucune nécessité de position, aucun sentiment d'amour-propre ne pouvait forcer Napoléon à combattre ses propres raisonnements et l'empêcher de s'écouter lui-même
ÉCRASERDepuis, comme il arrive toujours, l'infortune ayant écrasé ces guerriers, des reproches s'élevèrent
ÉCRASERAinsi les grandes expéditions s'écrasent sous leur propre poids ; les bornes humaines avaient été dépassées [dans l'expédition de Moscou] ; le génie de Napoléon, en voulant s'élever au-dessus du temps, du climat et des distances, s'était comme perdu dans l'espace
ÉCRÊTÉ, ÉEOn vit une terre toute piétinée [un champ de bataille], nue, dévastée, tous les arbres coupés à quelques pieds du sol, et plus loin des mamelons écrêtés
ÉCRIRELa plupart, comme ceux qui depuis ont écrit sur cette journée, ignoraient les souffrances physiques d'un chef qui....
ÉCROULEMENTIls l'aperçoivent [Rostopschine] au milieu des flammes qu'il attise, sourire à l'écroulement de cette superbe demeure
ÉCUEILSûr que tous les siens seront ralliés par sa victoire, par l'appât de ce riche butin, par l'étonnant spectacle de Moscou prisonnière, et par lui surtout, dont la gloire, du haut de ce grand débris, attirait encore comme un fanal sur un écueil
ÉCUYERL'empereur voulut l'apaiser, mais, ne pouvant s'en faire écouter, il se retira, Caulaincourt le poursuivant toujours de ses reproches.... Le lendemain, Napoléon ne put ramener à lui son grand écuyer que par des ordres formels et réitérés
ÉDIFICECes édifices [de Moscou], ces palais et jusqu'aux boutiques, étaient tous couverts d'un fer poli et coloré
EFFARÉ, ÉEUne longue file de cinq à six cents voitures embarrassait tous ses mouvements ; sept mille traîneurs effarés et hurlant de terreur et de désespoir se ruaient dans ses faibles lignes
EFFAREMENTIl faisait volte-face pour maintenir l'ennemi, quand tout à coup les hauteurs auxquelles il voulait appuyer sa gauche se couvrirent d'une foule de fuyards ; dans leur effarement, ces malheureux se précipitaient et roulaient jusqu'à lui sur la neige glacée qu'ils teignaient de leur sang
EFFAROUCHÉ, ÉELes paysans effarouchés avaient fui ; beaucoup de vivres étaient gaspillés
EFFECTUERPendant ce temps, le passage du Borysthène s'effectua sur plusieurs points
EFFERVESCENCEQuant à cette jeunesse d'élite qui, dans ces temps de gloire, remplissait nos camps, son effervescence était naturelle
EFFONDRERDans ces contrées, les neiges séjournent longtemps sur les terres ; elles filtrent au travers de leurs parties les moins solides, qu'elles pénètrent profondément, qu'elles délavent et effondrent
EFFORTLes soldats y attachaient encore plus de prix [à la propreté de leur uniforme] à cause de la difficulté, pour étonner, et parce que l'homme s'enorgueillit de tout ce qui est effort
EFFORTL'effort qu'il venait de faire pour atteindre Moscou avait usé tous ses moyens de guerre
EFFRACTIONCe maréchal lui montre des maisons couvertes de fer ; elles sont toutes fermées, encore intactes et sans la moindre effraction ; cependant une fumée noire en sort déjà
ÉGALERL'histoire n'en parle qu'à regret [de la conduite de Murat], depuis que le repentir et le malheur ont égalé le crime
ÉGOÏSMETelle était l'insouciance qui résultait de cette multiplicité d'événements et de malheurs sur lesquels on était comme blasé, et tel l'égoïsme produit par l'excès de fatigue et de souffrance, qu'ils ne laissaient à chacun que la mesure de force et de sentiment indispensable pour son service et sa conservation personnelle
ÉLANCERComment avancer, comment s'élancer à travers les vagues de cette mer de feu [l'embrasement de Moscou] ?
ÉLÉMENTNapoléon s'était éveillé à la double clarté du jour et des flammes ; dans son premier mouvement, il s'irrita et voulut commander à cet élément ; mais bientôt il fléchit....
ÉLÉMENTAu milieu de ce terrible orage d'hommes et d'éléments qui s'amasse autour de lui
ÉLITEIl [Napoléon] affecte de la mépriser [une rivière], comme tout ce qui lui faisait obstacle, et il ordonne à un escadron des Polonais de sa garde de se jeter dans cette rivière ; ces hommes d'élite s'y précipitèrent sans hésiter
ÉLOIGNEMENTSoit que, jeune, on craigne moins la mort, par l'instinct de son éloignement, ou qu'à cet âge, riche de jours et prodigue de tout, on prodigue sa vie comme les riches leur fortune
ÉLOQUENCEPuis il regagna Maloiaroslavetz, où le vice-roi lui montra les obstacles vaincus la veille ; la terre elle-même en disait assez : jamais champ de bataille ne fut d'une plus terrible éloquence
EMBARRASIl ne fallait que l'embarras d'un défilé, quelques marches forcées ou une boutade de cosaques pour nous débarrasser de tout cet attirail [bagages]
EMBARRASSERQuant aux soldats, plusieurs s'étant embarrassés des fruits de leur pillage, devinrent moins lestes, moins insouciants
EMBELLISSEMENTIls [les cosaques] ajoutaient que c'était un larcin fait à son pays [aller mourir en terre étrangère] ; que, vif, on se devait à sa culture, à sa défense, à son embellissement ; que, mort, on lui devait son corps qu'on tenait de lui, qu'il avait nourri, et dont à son tour on devait le nourrir
EMBOURBÉ, ÉEÀ chaque instant, une voiture renversée, une roue engravée, un seul cheval embourbé, un trait rompu arrêtait tout
EMBRASERUne chaleur pénétrante brûlait nos yeux ; un air dévorant, des cendres étincelantes, des flammes détachées embrasaient notre respiration courte, sèche, haletante et déjà presque suffoquée par la fumée
EMBRASSEROn voyait les colonnes russes se prolonger et se retrancher sur cette pente rase, d'une demi-lieue de rayon, d'où elles dominaient et embrassaient tout par leur nombre et leur position
ÉMEUTEL'émeute n'était alarmante que comme symptôme ; elle fut réprimée
EMMENERL'empereur fit un geste de mépris et d'humeur ; on emmena ce misérable [un des incendiaires de Moscou] dans la première cour, où les grenadiers furieux le firent expirer sous leurs baïonnettes
ÉMOTIONDès qu'il fut seul avec ses officiers les plus dévoués, toutes ses émotions éclatèrent à la fois par des exclamations d'étonnement, d'humiliation et de colère
ÉMOUVOIRLe lendemain, il apprit qu'on disputait à Delzons la possession de Malo-Iaroslavetz ; il ne s'en émut guère, soit confiance, soit incertitude dans ses projets
EMPARER (S')Comme un reste de vie se retire vers le coeur à mesure que la mort s'empare des extrémités
EMPEREURIl [Napoléon] a dit en saisissant son épée : j'ai assez fait l'empereur, il est temps que je fasse le général
EMPORTÉ, ÉEIl apprend qu'un régiment vient de s'emparer du village de Borodino et de son pont qu'il aurait dû rompre, mais qu'emporté par ce succès, il a franchi ce passage malgré les cris de son général
EMPORTEMENTQu'il y ait eu, dans les premiers moments, quelque emportement dans le pillage, cela doit-il étonner d'une armée exaspérée par de si grands besoins, si souffrante, et composée de tant de nations ?
ÉMU, UEDes rapports sinistres se succédaient ; il vint un officier de la police russe pour dénoncer l'incendie ; il donna tous les détails ; l'empereur ému chercha vainement quelque repos
ÉMULENous nous disions que c'était là [Moscou] le terme promis à nos travaux ; qu'enfin nous allions nous arrêter, puisque nous ne pouvions plus être surpassés par nous-mêmes, après une expédition noble et digne émule de celle d'Égypte, et rivale heureuse de toutes les grandes et glorieuses guerres de l'antiquité
ENNapoléon ajouta quelques menaces déjà moins violentes, et il s'en tint aux paroles, soit qu'il eût jeté toute sa colère dans un premier mouvement, soit qu'il n'eût voulu qu'en effrayer tous les Allemands qui seraient tentés de l'abandonner
ENCADRÉ, ÉEEn approchant, ils [de jeunes soldats allemands] rencontrèrent notre découragement et notre longue déroute ; en entrant en ligne, loin de se trouver encadrés et appuyés par de vieux soldats, ils se virent seuls aux prises avec tous les fléaux, pour soutenir une cause abandonnée de ceux qui étaient le plus intéressés à la faire triompher
ENCAISSÉ, ÉENous rencontrâmes une rivière étroite et encaissée entre des bords boisés et incultes ; c'était le Borysthène qui se présentait à nos yeux avec cette humble apparence
ENCEINTEQuelques chasseurs de la garde impériale venaient de mettre pied à terre, suivant l'usage, pour former une enceinte autour de lui [l'empereur]
ENCHAÎNÉ, ÉEIl [un officier russe] n'a été relâché qu'à Kowno, après vingt-six jours, ayant partagé toutes nos douleurs, libre d'y échapper, mais enchaîné par sa parole
ENCOMBRÉ, ÉEIl eut d'abord à s'avancer sur une route glissante, encombrée de bagages et de fuyards
ENCOMBREMENTCette multitude immense entassée sur la rive [de la Bérézina], pêle-mêle avec les chevaux et les chariots, y formait un épouvantable encombrement
ENFANTCe fut là [à la Bérésina] qu'on aperçut des femmes au milieu des glaçons, avec leurs enfants dans leurs bras, les élevant à mesure qu'elles s'enfonçaient ; déjà submergées, leurs bras roidis les tenaient encore au-dessus d'elles
ENFONCERLes Russes remplissaient en masse ce chemin creux ; Delzons et ses Français s'y enfoncent tête baissée ; les Russes rompus sont renversés
ENGAGERL'artillerie ennemie a profité des hauteurs qui, de son côté, bordent la rivière ; ses feux traversent le fond du repli dans lequel Delzons et ses troupes sont engagés
ENGOURDISSEMENTOn dit qu'il y eut dans tout ce mouvement un peu de l'engourdissement qui suit un long repos
ENNEMI, IENos soldats [à Moscou] rencontraient ces vaincus sans animosité, soit qu'ils crussent la guerre finie, soit insouciance ou pitié et que, hors du combat, le Français se plaise à n'avoir plus d'ennemis
ÉNORMITÉSes voeux tardifs [pour la paix] n'étant pas exaucés, il envisage l'énormité de ses forces, il revient sur les souvenirs de Tilsitt et d'Erfurt, il accueille des renseignements inexacts sur le caractère de son rival
ENSEMBLEIl s'agissait de surprendre l'armée russe, ensemble ou dispersée, de faire un coup de main avec quatre cent mille hommes
ENSEMBLESon combat de la veille et sa marche nocturne avaient achevé son corps d'armée ; ses divisions avaient encore quelque ensemble, mais pour se traîner, pour mourir et non pour combattre
ENTOURSa résolution fixée, il lui importait qu'elle ne mécontentât pas ses entours ; il pensait qu'en eux la persuasion aurait plus de zèle que l'obéissance
ÉPUISEMENTLes chefs et Mortier lui-même, vaincus par l'incendie qu'ils combattaient depuis trente-six heures, y vinrent [au Kremlin] tomber d'épuisement et de désespoir
ÉPURERLe malheur avait épuré l'armée ; ce qui en restait n'en pouvait être que l'élite, d'esprit comme de corps
ÉQUIPAGEOn ne concevait pas comment la tête de cette colonne [l'armée française sortant de Moscou] pourrait traîner et soutenir dans une si longue route une aussi lourde masse d'équipages
ESCARPÉ, ÉEIl avait d'abord fallu passer la Louja au pied de Malo-Iaroslavetz, dans le fond d'un repli que fait son cours, puis gravir une colline escarpée....
ESCARPEMENTDerrière eux [les Russes] et du haut des escarpements de la ville, leur avant-garde plongeait ses feux sur Delzons
ESCARPERC'est la nature du terrain qui a décidé Kutusof à refuser ainsi cette aile ; car ici le ravin, qui escarpe le plateau du centre, est déjà à sa naissance
ESPRITLa plupart arrivaient par détachements, formés en bataillons provisoires, sous des officiers nouveaux pour eux, qu'ils devaient quitter au premier jour, sans aiguillon de discipline, d'esprit de corps ni de gloire, et traversant un sol dévoré que la saison et le climat allaient rendre chaque jour plus nu et plus rude
ÉTABLIRDeux officiers s'étaient établis dans un des bâtiments du Kremlin ; de là leur vue pouvait embrasser le nord et l'ouest de la ville : vers minuit une clarté extraordinaire les réveilla
ÉTABLIRLe soir, ils [les Russes] s'établissaient de bonne heure dans une bonne position, ne laissant sous les armes que les troupes absolument nécessaires pour la défendre, tandis que le reste se reposait et dormait
ÉTATBien plus, il veut que l'inflexibilité des états de situation se plie à cette illusion ; il en conteste les résultats ; l'opiniâtreté du comte de Lobau ne peut vaincre la sienne, par là il veut sans doute faire comprendre à son aide de camp ce qu'il désire que les autres croient
ÉTAT-MAJOROn traversait les cours d'eau à des gués bientôt gâtés ; les régiments qui venaient ensuite, passaient ailleurs, où ils pouvaient ; on s'en inquiétait peu ; l'état-major général négligeait ces détails
ÉTENDREDepuis deux mois les deux armées ne s'étaient fait qu'une guerre de partisans ; son but, pour les Français, était de s'étendre dans le pays, pour y chercher des vivres....
ÉTOILEPour toute réponse à cette vive attaque, l'empereur le prit par la main [le cardinal Fesch], le conduisit à la fenêtre, l'ouvrit, et lui dit : Voyez-vous là haut cette étoile ? - Non, sire. - Regardez bien. - Sire, je ne la vois pas. - Eh bien ! moi, je la vois, s'écria Napoléon
ÉTONNEMENTEnfin nous aimions à voir en lui [Napoléon] le compagnon de nos travaux, le chef qui nous avait conduits à la renommée ; l'étonnement, l'admiration qu'il inspirait, flattaient notre amour-propre ; car tout nous était commun avec lui
ÉTOURDIMENTUn jeune officier d'état-major russe, à peine sorti de l'enfance, vint, en donnant étourdiment dans nos postes, se faire prendre avec ses dépêches
ÉTOURDIRPressé d'échapper au sentiment intérieur qui l'oppresse, il semble vouloir s'étourdir en s'abandonnant à une joie expansive
ÉTRANGER, ÈREL'hiver était si près de nous, qu'il n'avait fallu qu'un coup de vent de quelques minutes pour l'amener âpre, mordant, dominateur ; on sentit aussitôt qu'en ce pays il était indigène, et nous étrangers
ÉVACUATIONBagration et Barclay revenaient vers Smolensk à grands pas, l'un pour la sauver par une bataille, l'autre pour protéger la fuite de ses habitants et l'évacuation de ses magasins
ÉVASIONNapoléon, qui depuis accusa Davoust de l'évasion de l'aile gauche des Russes, pour être resté quatre jours dans Minsk
EXALTERAlors, s'exaltant pour exalter : Eh quoi ! c'est vous, ajoute-t-il, que cette pensée n'enflamme point ?
EXCENTRIQUEL'empereur russe ne s'était pas montré comme un homme de guerre aux yeux de ses ennemis ; ils le jugèrent ainsi sur ce qu'il avait négligé la Bérézina, seule ligne naturelle de défense de la Lithuanie ; sur sa retraite excentrique vers le nord, quand le reste de son armée fuyait vers le midi
EXCLAMATIONDès qu'il fut seul avec ses officiers les plus dévoués, toutes ses émotions [à la nouvelle de la conspiration de Malet] éclatèrent à la fois par des exclamations d'étonnement, d'humiliation et de colère
EXEMPLEOn voyait plusieurs de ces chefs blessés.... soutenir les meilleurs, retenir les plus ébranlés.... étonner à la fois les ennemis et leurs fuyards, et combattre l'exemple du mal par un plus noble exemple
EXPÉDITIONAinsi les grandes expéditions s'écrasent sous leur propre poids ; le génie de Napoléon, en voulant s'élever au-dessus du temps, du climat et des distances, s'était comme perdu dans l'espace
EXPLOSIONLe 23 octobre, à une heure et demie du matin, l'air avait été ébranlé par une effrayante explosion ; Mortier avait obéi, le Kremlin n'existait plus
EXPRESSIONPuis, montrant un ciel toujours pur, il leur demanda si dans ce soleil brillant ils ne reconnaissaient pas son étoile ; mais cet appel à sa fortune et l'expression sinistre de ses traits démentaient la sécurité qu'il affectait
EXTRÊMEEnfin un ciel dévorant l'arrêtait [Napoléon] ; car tel est ce climat [de Russie], le ciel y est extrême, immodéré ; il dessèche ou inonde, brûle ou glace cette terre et ses habitants qu'il semble fait pour protéger
FAVORABLEOn ne pouvait amener un convoi ni faire un fourrage sans combattre, de sorte que la guerre continuait partout, excepté où elle pouvait nous être favorable
FAVORI, ITECe maréchal [Bessières] devait son élévation à d'honorables services et à l'affection de l'empereur, qui s'était attaché à lui comme à sa création ; il est vrai qu'on ne pouvait être favori de Napoléon comme d'un autre monarque, qu'il fallait du moins l'avoir suivi, lui être de quelque utilité ; car il sacrifiait peu à l'agréable
FENDREVers minuit le passage a commencé ; mais les premiers qui s'éloignent du bord avertissent que la glace plie sous eux, qu'elle s'enfonce, qu'ils marchent dans l'eau jusqu'au genou ; et bientôt on entend ce frêle appui se fendre avec des craquements effroyables qui se prolongent au loin comme dans une débâcle
FENÊTREPartout [dans Smolensk] les portes et les fenêtres des maisons, brisées et arrachées, ont servi à alimenter les bivouacs ; ils [les soldats] n'y trouvent point d'asiles
FEUPlus près de l'incendie, ils ne pouvaient ni reculer, ni demeurer ; et comment avancer, comment s'élancer à travers les vagues de cette mer de feu [l'incendie de Moscou] ?
FEULa plupart des maisons et des palais qui avaient échappé au feu servirent d'abri aux chefs, et tout ce qu'elles contenaient fut respecté
FEULes autres chefs, ses vieux compagnons de gloire [du maréchal Mortier], l'avaient quitté les larmes aux yeux ; et l'empereur, en lui disant qu'il comptait sur sa fortune, mais qu'au reste, à la guerre, il fallait bien faire une part au feu [on le laissait à Moscou]....
FEUQuelqu'un l'arrêta [l'empereur], en lui montrant l'arrière-garde ennemie entre lui et la ville, et derrière, les feux d'une armée de cinquante mille hommes
FEUIl presse Davout qui le suit ; mais ce maréchal n'arriva près du champ de bataille qu'avec la nuit, quand les feux s'affaiblissaient, quand tout était décidé
FEUCinq fois dans cette journée ce poste se trouva dépassé par les colonnes russes qui poursuivaient les nôtres, et cinq fois ses coups, ménagés et tirés à propos sur leur flanc et sur leurs derrières, inquiétèrent et ralentirent leur impulsion ; puis, quand nous reprenions l'offensive, cette position les mettait entre deux feux, et assurait le succès de nos attaques
FEUPrès d'entrer dans ces maisons [de Moscou], toutes closes et inhabitées, ils avaient entendu en sortir une faible explosion ; elle avait été suivie d'une légère fumée qui aussitôt était devenue épaisse et noire, puis rougeâtre, enfin couleur de feu, et bientôt l'édifice entier s'était abîmé dans un gouffre de flammes
FEUÀ cette nouvelle, Napoléon retrouve le feu de ses premières années : mille ordres d'ensemble et de détail, tous différents, tous d'accord, tous nécessaires, jaillissent à la fois de son génie impétueux
FICTIF, IVEBernadotte fut forcé de choisir [entre l'Angleterre et la France] ; l'hiver et la mer le séparait des secours ou de l'agression des Anglais ; les Français touchaient à ses ports ; la guerre avec la France aurait donc été réelle et présente ; la guerre avec l'Angleterre pouvait n'être que fictive
FIER, IÈREÀ la fois fier et rusé, Kutusof savait préparer avec lenteur une guerre tout à coup impétueuse
FIER, IÈREL'empereur et la grande armée gardaient l'un envers l'autre un triste et noble silence ; on était à la fois trop fier pour se plaindre et trop expérimenté pour n'en pas sentir l'inutilité
FIERTÉIl [Napoléon] marche longtemps tout agité et l'entraîne sur ses pas, sans que sa fierté puisse se résoudre à rompre un si pénible silence ; elle va céder enfin, mais en menaçant ; il priera qu'on lui demande la paix, comme s'il daignait l'accorder
FIERTÉEt réellement, pendant quelques jours encore, la fierté d'une contenance inébranlable pouvait seule appuyer ses négociations
FIÈVREDès la nuit qui précéda cette bataille décisive, on a vu qu'une fièvre fatigante brûla son sang [de Napoléon], agita ses esprits, et qu'il en fut accablé pendant le combat
FIÈVREUne fièvre d'hésitation s'empare de lui [Napoléon] ; ses regards se portent sur Kief, Pétersbourg et Moscou
FIGURE[À un coup de vent qui amena l'hiver] tout changea, les chemins, les figures, les courages ; l'armée devint morne, la marche pénible ; la consternation commença
FILEIl fallait bien laisser à la longue file des traîneurs et des malades le temps de joindre, les uns leurs corps, les autres les hôpitaux
FIXERLe lendemain, il [le prince Eugène] continua sa route avec ceux que le froid de la nuit et de la mort [dans la retraite de Moscou] n'avait pas fixés autour de leur bivouac
FLAMMEPendant que nos soldats luttaient encore avec l'incendie, et que l'armée disputait au feu cette proie [Moscou], Napoléon, dont on n'avait pas osé troubler le sommeil pendant la nuit, s'était éveillé à la double clarté du jour et des flammes
FLAMMÈCHEDéjà des flammèches et des débris ardents volaient jusque sur les toits du Kremlin, quand le vent du nord, tournant vers l'ouest, les chassa dans une autre direction
FLANCLes Russes l'avaient-ils prévenu ? sa manoeuvre était-elle manquée ? n'aurait-il point mis assez de rapidité dans cette marche, où il s'agissait de dépasser le flanc gauche de Kutusof ?
FLANCUne lettre de Berthier à Kutusof, datée du premier jour de cette marche de flanc, fut à la fois une dernière tentative de paix et peut-être une ruse de guerre
FLANCEn défilant si près de l'ennemi, il fallait marcher serré pour ne pas lui prêter un flanc trop allongé
FLEUVEPour la première fois les eaux de ce fleuve moscovite [le Borysthène] allaient porter une armée française et réfléchir nos armes victorieuses
FLOCONL'armée marche enveloppée de vapeurs froides ; ces vapeurs s'épaississent ; bientôt c'est un nuage immense qui s'abaisse et fond sur elle en gros flocons de neige
FLOTTERAinsi son esprit paraît flotter entre deux grandes décisions, et les contradictions de ses paroles passent dans ses actions
FONDIls racontent comment ils ont trouvé le fond de chaque ravin rempli de casques, de shakos, de coffres enfoncés, d'habillements épars, de voitures et de canons....
FONDCette fois on n'eut pas besoin d'aller les chercher au loin [les Russes].... ce fut une joie générale : enfin cette guerre vague, molle, mouvante, où nos efforts s'amortissaient, dans laquelle nous nous enfoncions sans mesure, s'arrêtait ; on touchait au fond, au terme, et tout allait être décidé
FONDEnfin, sans tous ces motifs d'ardeur, le fond de l'armée était bon, et toute bonne armée veut la guerre
FONDREMurat lui-même s'inquiète enfin ; il a vu se fondre la moitié du reste de sa cavalerie
FORCECette soumission [du roi de Prusse] n'a point encore rassuré Napoléon ; à sa force, il ajoute la feinte, les forteresses que, par pudeur, il laisse à Frédéric, sa défiance en convoite encore l'occupation
FORCEIl [Davoust] s'écriait que des hommes de fer pouvaient seuls supporter de pareilles épreuves ; qu'il y avait impossibilité matérielle d'y résister ; que les forces humaines avaient des bornes, qu'elles étaient toutes dépassées
FORCESes voeux tardifs n'étant pas exaucés, il envisage l'énormité de ses forces, il revient sur les souvenirs de Tilsitt et d'Erfurt, il accueille des renseignements inexacts sur le caractère de son rival
FORCEEnfin, sans toutes ces causes de haine, la position de la Prusse entre la France et la Russie obligeait Napoléon à y être le maître, il ne pouvait y régner que par la force ; il ne pouvait y être fort qu'en l'affaiblissant
FORCEDans ce désastre désormais irrémédiable, où il fallait à chacun toute sa force
FORMEIl trouva le champ de bataille jonché de morts ; la plupart étaient dépouillés, surtout les Français ; on les reconnaissait à leur blancheur et à leurs formes moins osseuses et musculeuses que celles des Russes
FORT, ORTELes dernières levées étaient trop jeunes et trop faibles, il est vrai ; mais l'armée avait encore beaucoup de ces hommes forts et tout d'exécution, accoutumés aux situations critiques et que rien n'étonnait
FORT, ORTEL'armée d'Alexandre, forte de trois cent mille hommes, contenait ces peuples
FOUETTERLa tourmente leur fouette au visage la neige du ciel et celle qu'elle enlève à la terre ; elle semble vouloir avec acharnement s'opposer à leur marche
FOUILLERCe fut au travers de ce bouleversement que Napoléon rentra dans Moscou ; il l'abandonna à ce pillage, espérant que son armée, répandue sur ces ruines, ne les fouillerait pas infructueusement
FOULEBeaucoup de ces hommes isolés étaient des maraudeurs qui feignaient une maladie ou une blessure, pour s'écarter ensuite ; ce qu'on n'avait pas le temps d'empêcher, et ce qui arrivera toujours dans ces grandes foules qu'on pousse en avant avec tant de précipitation
FOURChaque jour il allait visiter les fours, goûter le pain, et s'assurer de la régularité de toutes les distributions
FOURGONL'empereur avait compté sur une multitude de voitures légères et sur de gros fourgons destinés chacun à porter plusieurs milliers de livres pesant, dans des sables que des chariots du poids de quelques quintaux traversent avec peine
FOURRAGELes hommes et les chevaux revenaient épuisés, ceux toutefois qui revenaient ; car chaque mesure de seigle, chaque trousse de fourrage nous étaient disputées
FOURRAGEOn ne pouvait amener un convoi ni faire un fourrage sans combattre
FOYER[À Moscou] aucun Moscovite ne se présente ; aucune fumée du moindre foyer ne s'élève ; on n'entend pas le plus léger bruit sortir de cette immense et populeuse cité
FRACASIls tirèrent mal, il est vrai, mais de si près, que la fumée, les feux et le fracas de tant de coups épouvantèrent les chevaux wurtembergeois et les renversèrent pêle-mêle
FRAISDéjà ses yeux fixés sur cette capitale [Moscou] n'exprimaient plus que de l'impatience ; en elle il croyait voir tout l'empire russe ; ces murs renfermaient tout son espoir, la paix, les frais de la guerre, une gloire immortelle
FRAPPERSurpris, quand il a frappé au coeur d'un empire, d'y trouver un autre sentiment que celui de la soumission et de la terreur, il se sent vaincu et surpassé en détermination
FREDONNERRien ne peut plus le fixer [Napoléon délibérant à Vitepsk d'aller à Moscou] ; à chaque instant il prend, quitte et reprend son travail ; il marche sans objet, demande l'heure, considère le temps ; et, tout absorbé, il s'arrête, puis il fredonne d'un air préoccupé, et marche encore
FRÉMISSEMENTCes guerriers [les soldats français] écoutaient avec un secret frémissement les pas de leurs chevaux retentir seuls au milieu de ces palais déserts [à Moscou]
FRIMASPendant que le soldat s'efforce pour se faire jour au travers de ces tourbillons de vents et de frimas, les flocons de neige, poussés par la tempête, s'amoncellent et s'arrêtent dans les cavités
FRISUREOn voyait cet officier général de soixante ans, assis sur un tronc d'arbre couvert de neige, s'occuper avec une imperturbable gaieté, dès que le jour revenait, des détails de sa toilette ; au milieu de cet ouragan, il faisait parer sa tête d'une frisure élégante et poudrée avec soin, se jouant ainsi de tous les malheurs et de tous les éléments déchaînés qui l'assiégeaient
FROIDLe jour s'avançait ; on s'épuisait en efforts inutiles ; la faim, le froid et les cosaques devenaient pressants
FROIDCe fut au travers de vingt-six degrés de froid que nous atteignîmes, le 4 décembre, Bienitza
FRONTLe front des Russes n'était plus en face de notre colonne, mais sur notre gauche
FRONTIl [Napoléon] multiplia ses ordres, il outra ses excitations, et il engagea de front une bataille qu'il avait conçue dans un ordre oblique
FRONTIÈRELe Dnieper coule de l'est à l'ouest jusqu'à Orcha, où il se présente pour pénétrer en Pologne ; mais là, des hauteurs lithuaniennes s'opposant à cette invasion le forcent de se détourner brusquement vers le sud et de servir de frontière aux deux pays
FUIRCe repos [dans une ville] et la honte de paraître fuir enflammèrent son imagination [de Napoléon] ; on l'entendit dicter des ordres...
FUMÉEEt, sans reprendre haleine, enivrés de la fumée et des feux qu'ils ont traversés, des coups qu'ils donnaient et de leur victoire, ils s'emportèrent dans la plaine haute et voulurent s'emparer des canons ennemis
FUNÉRAIRELà ils [les soldats tombés dans la retraite de Russie] gémissent en vain ; bientôt la neige les couvre ; de légères éminences les font reconnaître ; voilà leur sépulture ; la route est toute parsemée de ces ondulations comme un champ funéraire
FURIEAssaillis par un premier élan de cette furie française si célèbre, ils virent tout à coup les soldats de Morand au milieu d'eux et s'enfuirent déconcertés
FUSILLes doigts de beaucoup d'autres [soldats] gelèrent sur le fusil qu'ils tenaient encore, et qui leur ôtait le mouvement nécessaire pour y entretenir un reste de chaleur et de vie
FUSILLADELa fusillade continuait ; son pétillement, redoublé par l'écho des murailles [de Smolensk], paraissait de plus en plus vif
FUSILLÉ, ÉEL'aspect de ces deux hôpitaux abandonnés, cette multitude de caissons livrés aux flammes, ces Russes fusillés [prisonniers dont on se débarrassait ainsi], tout la rendit funeste [la première journée d'hiver]
FUYARD, ARDEIl eut d'abord à s'avancer sur une route glissante, encombrée de bagages et de fuyards, contre un vent violent soufflant en face et au travers d'une nuit obscure et glaciale
GAGNEROn se rappelait que, dans une pareille position, Pierre 1er, en sacrifiant dix Russes contre un Suédois, avait cru non-seulement ne faire qu'une perte égale, mais même gagner à ce terrible marché
GAGNERCe combat, quoique peu décisif, préservait le grand-duché ; il réduisait sur ce point les Russes à se défendre, et donnait à l'empereur le temps de gagner une bataille
GALOPDéjà pour lui les courts exercices de la chasse, le galop des chevaux les plus doux étaient une fatigue ; comment soutiendrait-il donc les longues journées et les mouvements rapides et violents par lesquels les combats se préparent ?
GARDEIl dicta le bulletin de cette journée [bataille de la Moskowa] ; il se plut à apprendre à l'Europe que ni lui ni sa garde n'avaient été exposés
GARDEEn cheminant ainsi, il appela Mortier et lui ordonna de faire enfin avancer la jeune garde, mais surtout de ne point dépasser le nouveau ravin qui séparait de l'ennemi
GARDELe jour parut alors, montrant d'un côté les bataillons et les batteries russes qui, de trois côtés, devant, à droite et derrière nous, bordaient l'horizon ; et de l'autre, Napoléon et ses six mille gardes s'avançant d'un pas ferme et s'allant placer au milieu de cette terrible enceinte
GÂTÉ, ÉEComme si l'on pouvait obtenir un travail quelconque d'ouvriers exténués par la faim, par les marches ; de malheureux à qui le jour entier ne suffit pas pour trouver des vivres, pour les préparer, dont les forges sont abandonnées ou gâtées
GÂTÉ, ÉEÀ la nouvelle du départ de Napoléon, gâtés par l'habitude de n'être commandés que par le conquérant de l'Europe, n'étant plus soutenus par l'honneur de le servir, et dédaignant d'en garder un autre, ces vétérans [la vieille garde] s'ébranlèrent à leur tour et tombèrent dans le désordre
GÂTEROn ne s'en tint pas à l'utile, on voulut des embellissements ; des maisons de pierre gâtaient la place du palais [à Vitepsk], l'empereur ordonna à sa garde de les abattre et d'en enlever les débris
GAUCHENous marchions vers l'orient, notre gauche au nord, notre droite au midi
GAUCHEPendant qu'à l'extrême gauche Macdonald, débouchant de Tilsitt, envahira le nord de la Lithuanie et débordera la droite de Wittgenstein
GELÉ, ÉELà, sur les sillons raidis d'un champ gelé et parsemé de débris russes et français, il voulut, par la puissance de ses paroles, se décharger du poids de l'insupportable responsabilité de tant de malheurs
GELÉ, ÉECe ne fut qu'à onze heures du soir que les Russes y renoncèrent [à enlever un refuge où les Français étaient retirés], et qu'à demi gelés ils en allèrent chercher un autre dans les villages environnants
GELERLes doigts de beaucoup d'autres gelèrent sur le fusil qu'ils tenaient encore et qui leur ôtait le mouvement nécessaire pour y entretenir un reste de chaleur et de vie
GELERLeurs habits mouillés se gèlent sur eux ; cette enveloppe de glace saisit leurs corps et raidit tous leurs membres
GENDARMELes gendarmes, qui revoyaient cette armée pour la première fois depuis son désastre, étonnés à l'aspect de tant de misère, effrayés d'une si grande confusion, se découragèrent
GENDARMEVous êtes né [l'empereur parlant à Wintzingerode] dans les États de la confédération du Rhin ; vous êtes mon sujet ; vous n'êtes point un ennemi ordinaire, vous êtes un rebelle, j'ai le droit de vous faire juger ; gendarmes d'élite, saisissez cet homme-là ; les gendarmes restèrent immobiles, comme des hommes accoutumés à voir se terminer sans effet ces scènes violentes, et sûrs d'obéir mieux, en désobéissant
GÉNÉRAL, ALEQuant aux anciens généraux, quelques-uns n'étaient plus ces durs et simples guerriers de la république ; les honneurs, les fatigues, l'âge et l'empereur surtout, en avaient amolli plusieurs
GÉNÉRATIONTelles étaient les générations nouvelles ; alors on était libre d'être ambitieux ; temps d'ivresse et de prospérité, où le soldat français, maître de tout par la victoire, s'estimait plus que le seigneur ou même le monarque dont il traversait les États !
GÉNÉREUX, EUSELa résolution de cette assemblée [des notables de Moscou] fut généreuse et digne d'une si grande nation ; le détail importe peu ; on sait assez qu'il est partout le même ; que tout dans le monde perd à être vu de trop près ; qu'enfin les peuples doivent être jugés par masses et par résultats
GÉNÉROSITÉEt réellement il y allait de la vie de s'arrêter un instant ; dans ce naufrage universel, tendre la main à son compagnon, à son chef mourant, était un acte admirable de générosité ; le moindre mouvement d'humanité devenait une action sublime
GENOULe munitionnaire n'obtint la vie qu'en se traînant longtemps sur ses genoux aux pieds de Napoléon
GESTEIl parcourt ses appartements d'un pas rapide ; ses gestes courts et véhéments dénotent un trouble cruel : il quitte, reprend et quitte encore un travail pressé pour se précipiter à ses fenêtres et contempler les progrès de l'incendie
GIGANTESQUEDéjà, depuis une heure, Murat et la colonne longue et serrée de sa cavalerie envahissaient Moscou ; ils pénétraient dans ce corps gigantesque, encore intact, mais inanimé [Moscou avait été abandonnée par ses habitants]
GIGANTESQUEOn sait que, dans ces entreprises aventureuses et gigantesques, tout devient faute quand le but en est manqué
GLACEEnfin, vers minuit, le passage a commencé ; mais les premiers qui s'éloignent du bord avertissent que la glace plie sous eux, qu'elle s'enfonce, qu'ils marchent dans l'eau jusqu'aux genoux ; et bientôt on entend ce frêle appui se fendre avec des craquements effroyables qui se prolongent au loin comme dans une débâcle
GLACÉ, ÉELe 6 décembre, le jour même qui suivit le départ de Napoléon, le ciel se montra plus terrible encore ; on vit flotter dans l'air des molécules glacées ; les oiseaux tombèrent roidis et gelés
GLACÉ, ÉELe Vop coulait sur un lit de fange que resserrent deux rives escarpées ; il fallut trancher ses berges roides et glacées et donner l'ordre de démolir, pendant la nuit, les maisons voisines pour en construire un pont
GLACERLe fleuve était pris, il portait : le cours des glaçons que jusque-là il charriait, s'était suspendu ; l'hiver avait achevé de le glacer ; et c'était sur ce point seulement ; au-dessus et au-dessous, sa surface était mobile encore
GLACERLeur sang, se glaçant dans leurs veines, comme les eaux dans le cours des ruisseaux, alanguissait leur coeur, puis il refluait vers leur tête ; alors ces moribonds chancelaient comme dans un état d'ivresse
GLACIAL, ALEIl eut d'abord à s'avancer sur une route glissante, encombrée de bagages et de fuyards, contre un vent violent soufflant en face et au travers d'une nuit obscure et glaciale
GLAÇONOn lui confirme que, sur ce point, la Bérézina n'est pas seulement une rivière, mais un lac de glaçons mouvants
GLOBEDes officiers arrivaient de toutes parts ; tous s'accordaient : dès la première nuit, un globe enflammé s'était abaissé sur le palais du prince Troubetskoï [à Moscou], et l'avait consumé
GLOIREOn était exalté par ce qu'il y a de mieux après la vertu, par la gloire
GORGELe roi [Murat] lui montre le nouveau flanc de l'ennemi : il faut l'enfoncer jusqu'à la hauteur de la gorge de leur grande batterie [des Russes] ; là, pendant que la cavalerie légère poussera son avantage, lui, Caulaincourt, tournera subitement à gauche avec ses cuirassiers, pour prendre à dos cette terrible redoute
GOTHIQUEÀ la vue de ce palais [le Kremlin], à la fois gothique et moderne, des Romanof et des Rurick, de leur trône encore debout, de cette croix du grand Ywan, et de la plus belle partie de la ville que le Kremlin domine et que les flammes encore renfermées dans le bazar semblent devoir respecter
GOUDRONNÉ, ÉEAussitôt le feu avait été mis à la Bourse [à Moscou] ; on avait aperçu des soldats de police russes l'attiser avec des lances goudronnées
GOUJATAlors des clameurs s'élevèrent ; déjà quelques femmes et quelques goujats revenaient sur leurs pas en courant, n'entendant plus rien, ne répondant à aucune question, l'air tout effaré, sans voix et sans haleine
GOUVERNEMENTC'étaient des seigneurs [les seigneurs russes] fiers de leur existence au milieu de leurs vastes possessions ; car le territoire presque entier du gouvernement de Moscou leur appartient, et ils y règnent sur un million de serfs
GOUVERNEURNapoléon n'entra qu'avec la nuit dans Moscou ; il s'arrêta dans une des premières maisons du faubourg de Dorogomilow ; ce fut là qu'il nomma le maréchal Mortier gouverneur de cette capitale
GRADELa plupart s'accordèrent sur la possibilité de conquérir la Russie, soit que leur espoir y vît à acquérir, suivant leur position, depuis un simple grade jusqu'à un trône ; soit qu'ils se fussent laissé prendre à l'enthousiasme des Polonais
GRAINUne famine s'annonçait en France [en 1812] ; bientôt la crainte universelle accrut le mal par les précautions qu'elle suggéra ; l'avarice, toujours prête à saisir toutes les voies de la fortune, s'empara des grains, encore à vil prix, et attendit que la famine les lui redemandât au poids de l'or
GRAND, ANDEÀ cette vue [des flammes se dirigeant sur le Kremlin], un grand soupçon s'empare de leur esprit ; les Moscovites, connaissant notre téméraire et négligente insouciance, auraient-ils conçu l'espoir de brûler avec Moscou nos soldats ivres de vin, de fatigue et de sommeil ?
GRAND, ANDEOn l'entendait répéter [un des ministres de Napoléon] que l'empereur n'était pas assez grand, qu'il fallait qu'il fût plus grand encore pour pouvoir s'arrêter
GRAND, ANDEDepuis dix ans, leurs routes [des départements de l'Est] étaient couvertes de voyageurs de tous les rangs qui venaient admirer la grande nation, la capitale chaque jour embellie, les chefs-d'oeuvre de tous les arts et de tous les siècles que la victoire y avait rassemblés
GRAND, ANDEAu reste, cette désunion entre ses grands ne déplaisait pas à Napoléon, elle l'instruisait ; leur accord l'eût inquiété
GRANDIRLa défensive, étant inquiète de sa nature, grandit souvent l'offensive, et la crainte, échauffant l'imagination, fait supposer à l'ennemi mille projets qu'il n'a pas
GRANDIRL'empereur lui-même s'était tant grandi, qu'il se trouvait à une distance démesurée des détails de son armée ; et Berthier, placé comme intermédiaire entre lui et des chefs, tous rois, princes ou maréchaux, était obligé à trop de ménagements
GRANITQu'enfin, contre cette vieille garde, contre cette forteresse vivante, contre cette colonne de granit, comme son chef l'avait appelée, les hommes étaient impuissants et que des canons pouvaient seuls la démolir
GRAS, ASSEDavoust, tout brûlant d'une colère qu'il concentre avec effort, répond qu'il propose une retraite à travers un sol fertile, sur une route vierge, nourricière, grasse, intacte, dans des villages encore debout et par le chemin le plus court
GRAVECes discussions prirent, dit-on, un caractère plus grave vers la fin de 1811 ; un témoin assure qu'alors le cardinal Fesch, jusque-là étranger à la politique, la mêla à ses controverses religieuses
GRAVIRUne pente de verglas y entraînait les voitures, elles s'y enfonçaient : pour les en retirer, il fallait gravir contre la rampe opposée, sur un chemin de glace, où les pieds des chevaux couverts d'un fer usé et poli ne pouvaient pas mordre
GRELOTTERLes malheureux se traînent encore en grelottant, jusqu'à ce que la neige, qui s'attache sous leurs pieds en forme de pierre, quelque débris, une branche, ou le corps de l'un de leurs compagnons les fasse trébucher et tomber
GRENADIERL'empereur appelle aussitôt deux grenadiers de sa garde, il les place à sa table, près de lui, il leur fait commencer l'épreuve de cette nourriture ainsi préparée [bouillie de seigle préalablement grillé] ; elle leur réussit mal, quoiqu'il y eût ajouté de son propre vin, qu'il leur versa lui-même
GRENIERS'emparer de Kalougha et de Toula, le grenier et l'arsenal de la Russie
GRILLERAussitôt des soldats affamés se jetaient sur ces chevaux abattus et les dépeçaient ; puis, sur des feux faits des débris de leurs voitures, ils grillaient ces chairs toutes sanglantes et les dévoraient
GRONDERAu milieu de ces préparatifs et dans l'instant où Napoléon passait en revue, dans la première cour du Kremlin, les divisions de Ney, tout à coup le bruit se répand autour de lui que le canon gronde vers Winkowo
GROUPERPlusieurs des hommes débandés s'étaient arrêtés subitement ; ceux qui les suivaient, les atteignant, se groupaient avec eux : d'autres, déjà plus avancés, reculaient sur les premiers, ils s'attroupaient, bientôt ce fut une masse
GUÉOn traversait les cours d'eau à des gués bientôt gâtés ; les régiments qui venaient ensuite passaient où ils pouvaient ; on s'en inquiétait peu ; l'état-major général négligeait ces détails
GUERREToutefois, dans ces moyens irréguliers, il y en avait que l'importance du but pouvait excuser ; il s'agissait de surprendre l'armée russe, ensemble ou dispersée, de faire un coup de main avec quatre cent mille hommes ; la guerre, le pire des fléaux, en eût été plus courte
GUERRESuivant son usage, il se promène devant les rangs ; il sait quelles sont les guerres que chaque régiment a faites avec lui
GUERREQuant à lui [Napoléon], sa tête est son conseil, tout part de là ; mais Alexandre, qui le conseillera ? qui opposera-t-il ? il n'a que trois généraux, Kutusof, qu'il n'aime pas parce qu'il est Russe ; Beningsen, trop vieux il y a six ans, aujourd'hui en enfance ; et Barclay ; celui-ci manoeuvrera, il est brave, il sait la guerre ; mais c'est un général de retraite
GUERREAinsi la guerre était partout, devant, sur nos flancs, derrière nous ; l'armée s'affaiblissait ; l'ennemi devenait chaque jour plus entreprenant
GUERRIER, IÈREDepuis, comme il arrive toujours, l'infortune ayant écrasé ces guerriers [les soldats entrés dans Moscou], des reproches s'élevèrent ; eh ! qui ne sait que de pareils désordres ont toujours été le mauvais côté des grandes guerres, le côté honteux de la gloire ; que la renommée des grands conquérants porte son ombre comme toutes les choses de ce monde ?
GUIDECette petite guerre avait été tout à l'avantage des Russes, les nôtres ignorant le pays, sa langue, jusqu'aux noms des lieux où ils s'aventuraient, enfin étant sans cesse trahis par les habitants, et même sans guides
HABILETÉSon premier mouvement [de Napoléon] le porta à mépriser cet avis [de la marche de l'armée russe sur son flanc] ; car, soit fierté, soit expérience, il s'était accoutumé à ne pas supposer à ses adversaires l'habileté qu'il aurait eue à leur place
HABITL'hiver moscovite les attaque de toutes parts : il pénètre au travers de leurs légers vêtements et de leur chaussure déchirée ; leurs habits mouillés se gèlent sur eux ; cette enveloppe de glace saisit leurs corps et roidit tous leurs membres
HABITABLES'il [Napoléon] y avait [à Vitepsk] conservé et rétabli son armée.... alors ses quartiers d'hiver eussent été habitables ; mais aujourd'hui rien n'y est prêt
HABITANT, ANTEElles [les voitures] portent aussi des femmes françaises avec leurs enfants ; jadis ces femmes furent d'heureuses habitantes de Moscou ; elles fuient aujourd'hui la haine des Moscovites que l'invasion a appelée sur leurs têtes ; l'armée est leur seul asile
HABITATIONCe n'étaient point des barbares cherchant de meilleurs climats, des habitations plus commodes, des spectacles plus enivrants, de plus grandes richesses
HAÏ, ÏESes peuples [de la Prusse] accoururent sur notre passage pour contempler nos blessures.... il fallut repaître leurs avides regards de nos misères, et, traînant notre infortune au travers de leur odieuse joie, marcher sous l'insupportable poids d'un malheur haï
HAINEL'avant-garde laissa au corps qui la suivait le soin de les ramasser [des soldats russes restés à Moscou] ; ceux-là à d'autres, et ainsi de suite ; de sorte qu'ils restèrent libres au milieu de nous, jusqu'à ce que, l'incendie et le pillage leur ayant marqué leur devoir et les ayant tous ralliés dans une même haine, ils allèrent rejoindre Kutusof
HALTELà cette guerre qui nous suivait depuis Moscou se ralentit.... une plus grande lutte [la campagne de 1813] se préparait, et cette halte ne fut pas un temps qu'on accorda à la paix, mais qui fut donné à la préméditation du carnage
HAMEAUComment se persuader que tant de palais somptueux [à Moscou], de temples si brillants et de riches comptoirs étaient abandonnés par leurs possesseurs, comme ces simples hameaux qu'il [Napoléon] venait de traverser ?
HARANGUERPuis il revint à sa vieille garde, et, s'arrêtant devant chaque bataillon : Grenadiers, leur dit-il.... il fit haranguer de même ses autres troupes
HARASSÉ, ÉEIl [l'empereur] ne dissimula pas à ce maréchal qu'il arrivait à Smolensk avec une armée harassée et une cavalerie toute démontée
HASARDERDes Français, habitants de Moscou, se hasardent à sortir de l'asile qui, depuis quelques jours, les dérobe à la fureur du peuple : ils confirment la fatale nouvelle [le projet d'incendier Moscou]
HASARDEUX, EUSENapoléon, réduit à de si hasardeuses conjectures, arrivait tout pensif à Vereia
HAUT, AUTELà ils s'arrêtent et se resserrent ; Français et Italiens, tous défendent avec acharnement les issues hautes de la ville, et les Russes, enfin rebutés, reculent et se concentrent sur la route de Kalougha
HAUT, AUTEDès lors cette entreprise où il s'était si témérairement engagé [l'expédition de Moscou], terminée heureusement et à force d'audace, sera le fruit d'une haute combinaison ; son imprudence sera sa grandeur
HAUT, AUTEYorck [général prussien] voyait de plus haut [que le reste des Prussiens] ; il était de cette société des Amis de la Vertu, dont le principe était la haine des Français, et le but, leur entière expulsion de l'Allemagne
HAUTEUREnfin une dernière hauteur reste à dépasser ; elle touche à Moscou, qu'elle domine ; c'est le Mont du Salut ; il s'appelle ainsi parce que, de son sommet, à l'aspect de leur ville sainte, les habitants se signent et se prosternent
HAUTEURS'il passe en revue ses différents corps d'armée, comme leurs bataillons réduits ne lui offrent plus qu'un front court qu'en un instant il a parcouru, cet affaiblissement l'importune ; et, soit qu'il veuille le dissimuler à ses ennemis ou même aux siens, il déclare que jusqu'alors c'est par erreur qu'on les a rangés sur trois hommes de hauteur, que deux suffisent ; il ne forme donc plus son infanterie que sur deux rangs
HAUTEURLes instructions de Lauriston portaient qu'il ne devait s'adresser qu'à Kutusof ; il rejeta donc avec hauteur toute communication intermédiaire
HÉROÏSMENey s'était mis hors de sa portée [de l'envie] ; pour lui, dans tout cet héroïsme, il était si peu sorti de son naturel, que, sans l'éclat de sa gloire dans les yeux, dans les gestes et dans les acclamations de tous, il ne se serait point aperçu qu'il avait fait une action sublime
HÉROSIl [Ney] donna trois heures au ralliement ; et, sans se laisser agiter par l'impatience et le péril de l'attente, on le vit s'envelopper de son manteau, et, ces trois heures si dangereuses, les passer à dormir profondément sur le bord du fleuve ; tant il avait le tempérament des grands hommes, une âme forte dans un corps robuste, et cette santé vigoureuse sans laquelle il n'y a guère de héros !
HÉROSChacun de ces derniers jours avait eu ses hommes remarquables ; entre autres celui du 16, Eugène, celui du 17, Mortier ; mais dès lors tous proclamèrent Ney le héros de la retraite
HÉSITATIONToutes ces paroles que l'empereur venait de prodiguer ne prouvaient que son désappointement et qu'une grande hésitation le ressaisissait ; car en lui le bonheur était moins communicatif, et la décision moins verbeuse
HÉSITERIl y eut des endroits où il fallut franchir de larges crevasses et sauter d'une glace à l'autre, au risque de tomber entre deux et de disparaître pour jamais ; les premiers hésitèrent, mais on leur cria par derrière de se hâter
HÉSITERDans ce grand naufrage, l'armée, comme un vaisseau battu par la plus horrible tempête, jetait, sans hésiter, à cette mer de neige et de glace tout ce qui pouvait appesantir ou retarder sa marche
HEURELa nuit arrive alors, une nuit de seize heures ; mais, sur cette neige qui couvre tout, on ne sait où s'arrêter, où s'asseoir, où se reposer, où trouver quelques racines pour se nourrir
HEUREUX, EUSEPuis, comme les hommes longtemps heureux, ce qu'il [Napoléon] désire, il l'espère
HEURTERQuand le prince russe et son armée qu'Alexandre appelait vers le nord, poussèrent sur Sida, ils se heurtèrent contre Davoust et furent forcés de se replier sur eux-mêmes
HEXAGONAL, ALEQuelques autres de ces officiers [dans la retraite de Moscou] remarquaient avec une curieuse attention la cristallisation régulière et hexagonale de chacune des parcelles de neige qui couvraient leurs vêtements
HIDEUX. EUSEElle [l'armée du maréchal Victor] regardait avec effroi défiler ces malheureux soldats décharnés, le visage terreux et hérissé d'une barbe hideuse, sans armes, sans honte, marchant confusément....
HISTOIREJ'entreprends de tracer l'histoire de la grande armée et de son chef pendant l'année 1812
HISTOIREPuis, s'appesantissant, ils le voyaient [Napoléon à Moscou] passer ses longues heures à demi couché, comme engourdi, et attendant, un roman à la main, le dénoûment de sa terrible histoire
HIVERL'hiver était si près de nous qu'il n'avait fallu qu'un coup de vent de quelques minutes pour l'amener âpre, mordant, dominateur ; on sentit aussitôt qu'en ce pays il était indigène et nous étrangers
HIVERC'est à cent lieues plus loin que Smolensk, c'est à Minsk qu'il lui faut [à Napoléon] aller chercher des quartiers d'hiver, dont quarante marches le séparent
HOMMECelui de nos chefs que jusque-là on avait vu le plus rigoureux pour le maintien de la discipline, ne se trouve plus l'homme de la circonstance
HONNEURDésormais son nom [de Rostopchine] appartient à l'histoire ; toutefois il n'eut que la plus grande part à l'honneur de ce grand sacrifice [l'abandon de Moscou] ; il était déjà commencé dès Smolensk, lui l'acheva
HONNEURC'est une nation de héros [les Polonais], se faisant valoir au delà de la vérité, mais ensuite mettant leur honneur à rendre vrai ce qui d'abord n'avait été ni vrai ni même vraisemblable
HONNEUREnfin les lanciers russes se rebutèrent ; leur fuite, les cris de joie de notre armée, l'ordre d'honneur que l'empereur envoya sur le champ même aux plus braves, tout apprit à ces vaillants soldats leur gloire, qu'ils n'appréciaient pas encore, les belles actions paraissant toujours simples à ceux qui les font
HÔPITALSmolensk n'était plus qu'un vaste hôpital, et le grand gémissement qui en sortait l'emporta sur le cri de gloire qui venait de s'élever des champs de Valoutina
HORREUROn sut par lui [un général blessé et abandonné] ce crime : un frémissement d'horreur se propagea dans la colonne, il parvint jusqu'à l'empereur
HORREUREnfin le jour, un jour sombre parut ; il vint s'ajouter à cette grande horreur [l'incendie de Moscou], la pâlir, lui ôter son éclat
HORREURSi l'ennemi échappait à ce danger [l'incendie de Moscou], du moins n'aurait-il plus d'asile, plus de ressources ; et l'horreur d'un si grand désastre, dont on saurait bien l'accuser, soulèverait toute la Russie
HORRIBLEQuelle serait sur l'ennemi l'effet de cette barbarie [le meurtre des prisonniers russes] ? ne lui laissions-nous pas nos blessés, une foule de prisonniers ? lui manquerait-il de quoi exercer d'horribles représailles ?
HOSTILEMENTIls [les Français] trouvaient, à quelques werstes de la route [de Moscou], tous les villages habités, et n'y étaient pas reçus trop hostilement
HOURRACe qui augmenta le péril, c'est qu'on prit d'abord ces clameurs pour des acclamations, et ces hourras pour des cris de vive l'empereur ; c'était Platof et six mille cosaques...
HUMILIÉ, ÉEPendant qu'il [Davoust] avançait de quelques pas et jetait, sans le savoir, la terreur chez les Russes, la grande armée étonnée leur tournait le dos, elle marchait les yeux baissés, comme honteuse et humiliée
HUSSARDPlusieurs des meilleurs hussards du 8e, engagés sans être soutenus dans un bois, venaient d'y périr sous les efforts de la garde russe
HUSSARDLe zèle des hussards noirs et des dragons prussiens parut redoubler ; les hussards russes furent sabrés et culbutés dans Kelm
ICONOCLASTECette race [les Juifs] est en horreur aux Russes, peut-être parce qu'elle est presque iconoclaste, tandis que les Moscovites poussent l'adoration des images jusqu'à l'idolâtrie
ILLUSIONL'empereur s'y prêtait complaisamment [au zèle de ses soldats], s'aidant de tout pour espérer, quand vinrent tout à coup les premières neiges ; avec elles tombèrent toutes les illusions dont il cherchait à s'environner
IMMORTALITÉCette insatiable passion de la gloire, cet instinct puissant qui pousse l'homme à la mort pour chercher l'immortalité
IMPASSIBLEÀ cette foule de malheurs, il [Napoléon] ne peut opposer qu'une résistance inerte, une fermeté impassible, une attitude inébranlable
IMPERTURBABLEOn voyait cet officier général de soixante ans assis sur un tronc d'arbre couvert de neige [dans la retraite de Russie], s'occuper avec une imperturbable gaieté, dès que le jour revenait, des détails de sa toilette
INACTIONOn le vit inquiet ; soit que, comme à tous les hommes d'action, l'inaction lui pesât, et qu'à l'ennui d'attendre il préférât le péril....
INANITIONPartout [dans Moscou] des soldats assis sur des ballots de marchandises, sur des amas de sucre et de café, au milieu des vins et des liqueurs les plus exquises, qu'ils voudraient échanger contre un morceau de pain ; plusieurs, dans une ivresse qu'augmente l'inanition, sont tombés près des flammes, qui les atteignent et les tuent
INAPPRÉCIÉ, ÉELà [après l'incendie de Moscou], les objets les plus rares, inappréciés par leurs possesseurs, sont vendus à vil prix
INATTAQUABLEIl [l'empereur] venait d'envoyer Bessières pour examiner l'attitude des ennemis ; ce maréchal a obéi : il a soigneusement parcouru le front de la position des Russes ; elle est, dit-il, inattaquable
INCENDIAIRELe jour favorisa les efforts du duc de Trévise ; il se rendit maître du feu [à Moscou] ; les incendiaires se tinrent cachés ; on doutait de leur existence
INCENDIECette nuit fut triste [la première passée à Moscou] : des rapports sinistres se succédaient ; il vint des Français, habitants de ce pays, et même un officier de la police russe, pour dénoncer l'incendie
INCENDIECependant la surprise de Vinkowo, cette attaque inopinée de Kutusof devant Moscou, n'avaient été qu'une étincelle d'un grand incendie ; au même jour, à la même heure, toute la Russie avait repris l'offensive
INCERTAIN, AINECe fut alors que l'on vit s'élever de plusieurs points [dans Smolensk] d'épaisses et noires colonnes de fumée, qu'éclairèrent ensuite, par intervalles, des lueurs incertaines, puis des étincelles ; enfin de longues gerbes de feu jaillirent de toute part
INDÉPENDANT, ANTESes généraux, fatigués comme lui [Napoléon], trop indépendants les uns des autres, trop séparés, et en même temps trop dépendants de lui, osaient moins et attendaient souvent ses ordres
INDIFFÉRENCEBientôt ses actions [de Napoléon] démentirent ses paroles, et chacun s'étonna de son indifférence à donner des ordres pour un si grand établissement
INDUSTRIEÀ Smolensk, l'ordre avait été donné de prendre, en partant, pour plusieurs jours de vivres ; l'empereur n'en ignorait pas la difficulté, mais il comptait sur l'industrie des chefs et des soldats ; ils étaient avertis, cela suffisait ; ils sauraient bien pourvoir eux-mêmes à leurs besoins
INERTEÀ cette foule de malheurs il [Napoléon] ne peut opposer qu'une résistance inerte, une fermeté impassible, une attitude inébranlable
INEXÉCUTABLEDans ce pays désert, il ordonne l'achat de vingt mille chevaux.... quelques-uns des siens s'étonnèrent d'entendre des ordres si inexécutables
INSECTELa retraite n'avait été inquiétée que par quelques bandes de cosaques, insectes importuns qu'attiraient nos mourants et nos voitures abandonnées, fuyant partout où l'on portait la main, mais fatiguant par leur retour continuel
INSOUCIANCELes simples soldats, qui voient toute leur vie dans le moment présent, et qui, attendant peu de l'avenir, ne s'en inquiètent guère, conservaient leur insouciance, la plus précieuse de leurs qualités
INSTRUCTIONLes instructions de Lauriston portaient qu'il ne devait s'adresser qu'à Kutusof ; il rejeta donc avec hauteur toute communication intermédiaire
IRRITANT, ANTEQuant à l'empereur qu'on ne trompait guère, il n'eut que quelques instants d'une joie factice ; il se plaignit bientôt de ce qu'une guerre irritante de partisans voltigeait autour de lui
JETÉ, ÉEOn remarquait qu'on y avait marché [vers une position] languissamment ; qu'une division seule, jetée à trois lieues de tout secours, y avait été négligemment aventurée ; que les corps d'armée étaient restés hors de portée les uns des autres
JETERDans les chutes fréquentes qu'ils [les soldats français] faisaient, leurs armes s'échappaient de leurs mains ; elles se brisaient ou se perdaient dans la neige ; s'ils se relevaient, c'était sans elles ; car ils ne les jetèrent point, la faim et le froid les leur arrachèrent
JETERLa 15e division restait encore ; le vice-roi l'appelle ; elle s'avance en jetant une brigade à gauche dans le faubourg, et une à droite dans la ville
JETERDavoust, avec vingt-cinq mille hommes, resta à l'arrière-garde ; pendant qu'il avançait de quelques pas et jetait, sans le savoir, la terreur chez les Russes. la grande armée étonnée leur tournait le dos
JEUDaru lui [à Napoléon] répondit que la guerre était un jeu qu'il [Napoléon] jouait bien, où il gagnait toujours, et qu'on pouvait conclure qu'il la faisait avec plaisir
JOUIRPendant que Davoust jouissait peut-être du dangereux plaisir d'avoir humilié son ennemi [Berthier]
JOUREnfin le jour, un jour sombre, parut ; il vint s'ajouter à cette grande horreur [l'incendie de Moscou], la pâlir, lui ôter son éclat
JOURNALIER, IÈREUn officier, décidé à plaire ou persuadé que tout ce que l'empereur voulait devait s'accomplir, entra dans la ville [Moscou déserte], s'empara de cinq à six vagabonds, les poussa devant son cheval jusqu'à l'empereur, et s'imagina avoir amené une députation ; dès la première réponse de ces misérables, Napoléon vit qu'il n'avait devant lui que de malheureux journaliers
JOURNÉEEnfin on atteignit Gjatz avec la nuit ; mais cette première journée d'hiver avait été cruellement remplie : l'aspect du champ de bataille, de ces deux hôpitaux abandonnés, cette multitude de caissons livres aux flammes, ces Russes fusillés....
JUREMENTDes querelles, des clameurs, dont le bruit se joint aux roulements des tambours, aux jurements des charretiers, au bruit des caissons et des canons
KREMLINSon ambition [de Napoléon] est flattée de cette conquête : on l'entend s'écrier : je suis enfin dans Moscou, dans l'antique palais des czars, dans le Kremlin
LÂCHEDès les premiers pas, leurs rangs desserrés [des régiments] s'allongeaient en files lâches et interrompues
LANCEOn s'aida du terrain avec habileté : les lanciers russes, embarrassés dans les broussailles et arrêtés par les crevasses, allongeaient en vain leurs longues lances ; pendant qu'ils cherchaient à pénétrer, atteints par les balles, ils tombaient blessés
LANCERLa longue enceinte d'un camp, formé par un rang de fortes palissades, l'arrêta [un général russe] ; ses soldats, pressés par nos mouvements, n'eurent pas le temps d'y faire une trouée, et Murat lança contre eux ses Wurtembergeois pour leur faire mettre bas les armes
LANCIERCes malheureux [un régiment de chasseurs à cheval], se sentant sacrifiés, marchaient avec hésitation à une perte certaine ; aussi, dès le premier mouvement que firent les lanciers de la garde russe, tournèrent-ils le dos
LANGUISSAMMENTDes feux qui brillèrent sur notre gauche, dans la nuit du 23 au 24, avertirent du mouvement des Russes vers Malo-Iaroslavetz ; et cependant on remarquait qu'on y avait marché languissamment
LARGEURMalgré la largeur du chemin et les cris de son escorte, Napoléon avait peine à se faire jour au travers de cet immense cohue [l'armée sortant de Moscou]
LIGNEEn même temps, l'empereur désignait à chaque corps sa place ; le reste de l'armée entrait en ligne, et une fusillade générale, entrecoupée de quelques coups de canon, s'était établie
LIGNEComme les Russes se montrent par masses redoublées à leur centre et à leur droite, menaçant la route de Moscou, sur la ligne d'opération de la grande armée
LIGNEAu milieu d'elle [la grande armée], son chef, sombre et silencieux, paraissait mesurer avec anxiété sa ligne de communication avec les places de la Vistule
LIGNEUn régiment de Davoust cherchait à prendre son rang dans la première ligne
LINGEOn voyait plusieurs de ces chefs, blessés depuis la Moskowa, l'un le bras en écharpe, l'autre la tête enveloppée de linges, soutenir les meilleurs, retenir les plus ébranlés....
LONG, ONGUEOn ne concevait pas comment la tête de cette colonne pourrait traîner et soutenir, dans une si longue route, une aussi lourde masse d'équipages
LONGUEURC'était [l'armée française sortant de Moscou], sur trois ou quatre files d'une longueur infinie, un mélange, une confusion de calèches, de caissons, de riches voitures et de chariots de toute espèce
MAGASINIl n'y avait plus de biscuit, point de viande ; on leur délivra de la farine de seigle, des légumes secs et de l'eau-de-vie ; il fallut des efforts inouïs pour empêcher les détachements des différents corps de s'entre-tuer aux portes des magasins
MAGASINLe duc de Trévise observa qu'on pouvait y arriver par une marche plus méthodique que suivraient les magasins, mais il ne fut pas écouté
MAINElles [leurs armes] parurent à leurs bras engourdis un poids insupportable ; dans les chutes fréquentes qu'ils faisaient, elles s'échappaient de leurs mains, elles se brisaient ou se perdaient dans la neige
MAÎTRELe jour favorisa les efforts du duc de Trévise ; il se rendit maître du feu ; les incendiaires se tinrent cachés
MAÎTREL'empereur rassembla autour de lui tous les officiers de cavalerie encore montés ; il appela cette troupe d'environ cinq cents maîtres, son escadron sacré
MAJORCe major général [Berthier] suppléa peu son chef dans cette circonstance critique [à Moscou] ; au milieu de ce sol et de ce climat nouveau, il ne recommanda aucune précaution nouvelle ; et il attendit que les moindres détails lui fussent dictés par son empereur ; ils furent oubliés
MALHEURLes paroles, prononcées [par Napoléon] devant deux de ses généraux, étaient écoutées avec ce silence commandé par un ancien respect, auquel se joignait déjà celui qu'on devait au malheur

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