Définition de ENDORMIR

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : an-dor-mir

DÉFINITIONS

1
Faire dormir. Endormir un enfant.
Argus avec cent yeux sommeille ; Mais croyez-vous Endormir un amant jaloux ?
de QUINAULT dans Isis, III, 7
Sémantique : Fig. Il se dit de ce qui est fort ennuyeux, d'abord de l'ouvrage ou du récit, et, par suite, de l'auteur même. Cette pièce est si ennuyeuse qu'elle endort.
Je vous endormirai quelque jour des affaires de cette province
Allez de vos sermons endormir l'auditeur
Un style trop égal et toujours uniforme En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme
Soeur Andrieux, contez, contez, entendez-vous ? Si vous ne dormez pas, ma soeur, endormez-nous
de LEBRUN dans Épigr. à propos des Contes d'Andrieux
2
Jeter dans un état moral comparé au sommeil du corps. Endormir la prudence, la vigilance de quelqu'un.
Des mots Dont tous les courtisans endorment les plus sots
J'ai reconnu ses défaites, Et comment elle endort de douceur sa maison
Tandis qu'il endort votre crédulité par des discours
À cette erreur qui endort tant d'âmes impénitentes
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Car. Impénit. fin.
Il s'était laissé endormir par les lettres de César et les feintes démonstrations qu'il faisait paraître de souhaiter la paix
de VERT. dans Révol. rom. XIII, p. 265
3
Engourdir, calmer. Endormir un membre. Endormir la douleur.
Le monde endort les chagrins, mais il ne les guérit pas
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Av. Des afflict.
Le christianisme endort la douleur, fortifie la résolution chancelante
C'est ainsi que le commerce a trouvé l'art d'endormir et de tromper la discorde
4
S'endormir, Nature : v. réfl. Tomber dans le sommeil.
La charité nous oblige à réveiller ceux qui s'endorment
de PATRU dans Plaid. 5, dans RICHELET
C'est sur cette lecture que je m'endors
Il s'endort, il s'éveille au son des instruments, Son coeur nage dans la mollesse
On s'endormait aux sentiments de délicatesse qu'elle voulait expliquer sans les comprendre, et elle ennuyait en voulant briller
5
Sémantique : Fig. N'avoir pas soin de son devoir, de ses affaires, n'y pas veiller. S'endormir dans l'oisiveté.
Les officiers s'endorment sur la bonté de leurs maîtres
de PATRU dans Plaid. 4, dans RICHELET
Je laisse aux doucereux le langage affété Où s'endort un esprit de mollesse hébété
Les erreurs sur lesquelles votre esprit s'endort
Ne nous endormons point sur la foi de leurs prêtres
Le fils de Lasthénès ne s'était point endormi sur le danger de ses frères
Nature : Absolument. Ne pas s'endormir, être très éveillé sur ses intérêts.
Votre belle-mère ne s'endort point, et c'est sans doute quelque conspiration contre vos intérêts où elle pousse votre père
Il y a des gens qui ne s'endorment pas
Sémantique : Familièrement. S'endormir sur le rôti, négliger l'occasion propice.
6
S'endormir du sommeil de la mort, de la tombe, mourir.
S'endormir dans le Seigneur, mourir en état de grâce.
Joram s'endormit avec ses pères, il fut enseveli avec eux dans la ville de David
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Rois, IV, VIII, 24
Il s'est endormi cette nuit au Seigneur
Elle s'endort tranquillement au Seigneur et s'en retourne dans le sein de Dieu d'où elle était sortie
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Av. Mort du pécheur.

HISTORIQUE

1
XIe s.
Endormiz est, ne puet mais en avant [il ne peut aller plus loin]
dans Ch. de Rol. CLXXX
2
XIIe s.
Or poez [vous pouvez], fait il, esculter Del cher seignor, cum s'umilie ; Or nus [nous] cuide peler la fie [figue], E od beau parler endormir
de Benoît de Sainte-Maure dans II, 9069
Si'n ocist à destre e à senestre estrangement, de ci que le braz li fud endormiz des granz colps que il out dunez
dans Rois, p. 212
Sa main tendid vers l'ume Deu, e cumandad que il fust pris ; mais la main li endormid chalt pas [aussitôt], si que il ne la pout retraire
dans ib. 286
3
XIIIe s.
Plorant [elle] s'est endormie ; Diex la gard d'encombrer
dans Berte, XXXIX
L'Université, qui lors iere Endormie, leva la chiere
dans la Rose, 12030
Quant je la voi, de parler n'ai pooir, Li cuer me faut, ma langue est endormie, Complainte dou tens
de JUBINAL dans t. II, p. 255
Enlumine mes euz [yeux], que ne m'endorme en la mort
dans Psautier, f° 19
Li enfes s'est al fu [feu] assis, à endormir n'a gaires mis
dans Partonop. v. 1053
Perres [Pierre] endormis n'enjalez [engelés] N'a pas les dois seur la viele, Mais si bien chante et si viele....
de G. DE COINSI dans Du cierge.
4
XVe s.
....mon cueur endurera, En actendant d'avoir de celles Que bon eur lui apportera, Et de l'endormye beuvra
de Charles D'ORLÉANS dans Ball. 82
Que dites-vous ? dit-il, contrefaisant l'endormi
de LOUIS XI dans Nouv. LXIII
5
XVIe s.
Pour endormir l'ardeur de cette fureur [érotique]
de Michel de MONTAIGNE dans I, 94
Endormir les ouies par la continuation d'un son
de Michel de MONTAIGNE dans I, 106
Des medicaments qui assopissent et endorment la partie
de Michel de MONTAIGNE dans I, 281
Il lui vint aux jambes une douleur endormie avec une pesanteur
de Jacques AMYOT dans Sylla, 54
Laguerre n'estoit point esteincte ny amortie, ains seulement endormie
de Jacques AMYOT dans Lucull. 11
Quand l'eau n'estoit plus trouble, on pescha à l'endormie, à quoy ne fut pas espargnée la coque du Levant
Si un homme luy [à la torpille] touche avec une verge, elle luy endormira le bras
de Ambroise PARÉ dans XXIII, 29
Je ne veux point de trop volage amie, Ny ne la veux aussi trop endormie
de ST-GELAIS dans 230
Pierre leur disoit pour les endormir et les engager à le suivre
dans Mém. sur du Guesclin. ch. 18

ÉTYMOLOGIE

1
En 1, et dormir ; bourguig. andremi ; provenç. endormir, endurmir ; ital. indormire.

Synonymes de ENDORMIR

Termes proches de ENDORMIR