Définition de TREMBLER

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : tran-blé

DÉFINITIONS

1
Être agité de petits mouvements saccadés, être mû par de fréquentes secousses.
Et je tremble à présent dedans la canicule
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Sgan. 2
Point de vos cruelles bises qui font trembler Canaples et votre château ; j'espère pourtant bien y trembler comme les autres
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 578
Quand je l'ai aperçu [Fouquet, prisonnier], les jambes m'ont tremblé, et le coeur m'a battu si fort, que je n'en pouvais plus
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans Lett. à Pompone, 27 nov. 1664
Ses longs mugissements font trembler le rivage
de Jean RACINE dans Phèdre, V, 6
Il était décidé par l'université de Coimbre que le spectacle de quelques personnes brûlées à petit feu en grande cérémonie est un secret infaillible pour empêcher la terre de trembler
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Candide, VI
Jacques VI.... qui naquit quatre mois après cette aventure [un assassinat commis devant sa mère, Marie Stuart], trembla toute sa vie à la vue d'une épée nue, quelque effort qu'il fît pour surmonter cette disposition de ses organes
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 169
ôtez ce nom de quaker, cette habitude révoltante de trembler en parlant dans leurs assemblées religieuses.... il faudra convenir que ces primitifs sont les plus respectables de tous les hommes
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans ib. 153
Il tremblait comme la feuille ; en passant dans l'antichambre les forces lui manquèrent
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Hél. III, 14
Nous sortîmes en frémissant, et nous sentîmes les rochers auxquels la digue est appuyée trembler à cent pas de distance
de Jean-François MARMONTEL dans Mém. VII
De longues herbe tremblent aux ouvertures des dômes
de François René CHATEAUBRIAND dans Génie, III, V, 5
2
En parlant des choses, s'ébranler facilement, n'être pas ferme Ce pont suspendu tremble sous le poids des voitures.
Sémantique : Fig.
Je me suis nourri aux grands ouvrages ; je nage quand j'y travaille ; et le marbre tremble devant moi, pour grosse que soit la pièce
de PUGET dans Lett. à Louvois, 1683, dans Journ. des Débats, 17 mars 1869
3
Il se dit de la voix qui n'est pas ferme, qui chevrotte.
Je suis bien vieux, mais en vain ma voix tremble ; Accueillez-moi, j'aime à chanter aussi
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Bon vieill.
Sémantique : Terme de musique. Exécuter un tremblement.
4
Il se dit des ondulations de la lumière.
La distance infinie de l'astre à demi voilé, dont les rayons tremblaient à leur surface [des eaux]
de Denis DIDEROT dans Salon de 1767, Oeuv. t. XIV, p. 243, dans POUGENS
Où tremblent dispersés quelques pâles rayons, De ces lacs enflammés lumière ténébreuse [en enfer]
de Jacques DELILLE dans Parad. perdu, I
5
Fig Craindre, appréhender. Tel menace qui tremble.
M. le Prince disait une fois à un nouveau chirurgien : Ne trembles-tu point de me saigner ? Pardi, monseigneur, c'est à vous de trembler : il disait vrai
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 273
Tout contribue au bonheur du roi ; aussi, quand j'ai peur pour mon fils, c'est par la raison que l'on fait quelquefois des pertes particulières dans les victoires publiques ; mais de la barque entière, je ne tremblerai jamais
de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de SÉVIGNÉ dans 16 sept. 1676
Je tremble au seul récit de la tempête furieuse...
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Reine d'Anglet.
Pendant que nous tremblons sous la main de ces hautes puissances [les princes], Dieu les frappe pour nous avertir
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
Tremblez, âmes réconciliées, qui renoncez si souvent à la grâce de la pénitence, tremblez au terrible exemple de la princesse Palatine
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Anne de Gonz.
Et mon esprit, tremblant sur le choix de ses mots, N'en dira jamais un, s'il ne tombe à propos
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. II
Tout.... Doit marcher, doit fléchir, doit trembler sous vos lois
de Jean RACINE dans Iph. IV, 6
Mon génie étonné tremble devant le sien
de Jean RACINE dans Brit. II, 2
J'exigeai qu'il [Mithridate] détruisît sa flotte.... Mithridate resta immobile ; et Marius, au milieu de Rome, en trembla
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Dial. de Sylla et d'Eucrate.
Le crime tremble toujours devant la justice
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Pol. et lég. Fragment sur la justice.
La France était plus en danger que jamais [sous François Ier] ; Charles était déjà à Soissons, et le roi d'Angleterre prenait Boulogne ; on tremblait pour Paris
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Moeurs, 125
Ne vaudrait-il pas mieux que chacun mangeât son pain en paix à l'ombre de son figuier [au lieu de se persécuter] ? je ne fais cette proposition qu'en tremblant
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dict. phil. Hérésies, I
Je tremble d'avoir à me plaindre de l'être des êtres en portant une vue attentive sur cet épouvantable tableau [les maux des hommes]
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Dial. 25
Un pavillon qui ne tremble point devant celui de la Grande-Bretagne
de Guillaume Thomas, abbé RAYNAL dans Hist. phil. VII, 13
Chacun baise en tremblant la main qui nous enchaîne : avec la permission du poëte, cela est faux ; on ne tremble point ; on veut de l'argent, et on ne baise que la main qui paye
de Paul Louis COURIER dans Corresp. mai 1804
Faire trembler, inspirer de la terreur, donner de l'inquiétude.
Il faut que je m'élève au-dessus de l'homme, pour faire trembler toute créature sous les jugements de Dieu
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Reine d'Anglet.
Ils [les Gaulois] se jetèrent dans la Macédoine qu'ils ravagèrent, et firent trembler toute la Grèce
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Hist. I, 8
M. de Meaux m'a envoyé des nouvelles de Rome, qui font trembler pour M. de Cambrai
de Françoise d'Aubigné, marquise de MAINTENON dans Lett. au cardin. de Noailles, 24 sept. 1697
J'avoue, lui dis-je, que, quand on a une fois fait trembler quelqu'un, on conserve presque toujours quelque chose de l'avantage qu'on a pris
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Dial. de Sylla.
Sémantique : Familièrement. à faire trembler, beaucoup, extrêmement.
Une femme de la cour ayant demandé à l'évêque de Meaux, dans le fort de sa querelle théologique avec Fénelon, si cet archevêque avait en effet autant d'esprit qu'on le disait : Ah ! ma dame, répondit Bossuet, il en a à faire trembler
de Jean Le Rond D'ALEMBERT dans Élog. Fén.
6
Trembler à, suivi d'un infinitif, éprouver une vive crainte en.
Toute ingrate qu'elle est, je tremble à lui déplaire
de Pierre CORNEILLE dans Perth. II, 6
Vous voyez que je tremble à vous le déclarer
de Pierre CORNEILLE dans Oth. v, 8
Je frémis de le perdre, et tremble à m'y résoudre
de Thomas CORNEILLE dans Essex, III, 2
Je tremble à vous nommer l'ennemi qui m'opprime
de Jean RACINE dans Mithr. I, 2
Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.
7
Activement. Trembler la fièvre, être dans le frisson de la fièvre.
On dit de même : trembler le frisson.
J'ai fini ma lettre en tremblant le frisson
de Mlle DE LESPINASSE dans Lett. t. I, p. 101, dans POUGENS

REMARQUE

1
1. Trembler suit les mêmes règles que craindre. On le construit avec de et l'infinitif : Je tremble de le voir, de ne pas le voir ; avec que.... ne et le subjonctif, quand on désire que la chose n'arrive pas : Je tremble qu'il ne succombe ; avec que... ne pas et le subjonctif, quand on désire que la chose arrive : Je tremble qu'il ne réussisse pas.
2
2. Quelquefois au lieu de de, on emploie à ; mais alors le sens est un peu différent. Je tremble de le voir veut dire : je crains de le voir ; et je tremble à le voir, j'éprouve de la crainte en le voyant. " Je tremble de, dit M. Géruzez, ainsi que le veulent aujourd'hui les grammairiens, n'aurait ni la même vivacité, ni la même énergie, ni tout à fait le même sens. Il faut se hâter de reprendre dans nos grands écrivains tout ce que la tyrannie des puristes ne nous a pas définitivement enlevé. "

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Li cors li tranble
dans Ronc. p. 21
2
XIIIe s.
Et que pourront dire si ennemi [de Dieu] Là où li saint trembleront de doutance ?
de QUESNES dans Romancero, p. 96
Là ot si grand bruit et si grant noise, qu'il sembloit vraiement que toute terre tremblast
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans XVII
Qar messire Coart li lievres, Qui de peor trembloit les fievres, Deus jors les avoit jà eües
dans Ren. 10150
Li lechierres fremist et tranble, De lecherie esprent et art
dans ib. 1005
Les povres dehors [les avares] regardent De froit trembler, de fain perir
dans la Rose, 5141
Pris fu sire Coars li lievres, Mais li roncins en ont les fievres, Et sachiez que mès ne les tramble, Escorchiez en fu, ce me semble
de RUTEBEUF dans 290
3
XVe s.
Le dieu en tremblant [agitant] une espée lui dit....
dans Perceforest, t. IV, f° 154
Trembloit comme la feuille en l'arbre
dans Aresta amorum, p. 220, dans LACURNE
4
XVIe s.
Uses hardiment des verbes et participes qui, de leur nature, n'ont point d'infinitifs après eux, avec des infinitifs, comme tremblant de mourir, etc. pour craignant de mourir....
de Joachim DU BELLAY dans I, 32, verso
Avec une voix tremblante entre le desir et la crainte
de Marguerite de Navarre, dite aussi de Valois, ou d'Angoulême, reine de Navarre dans Nouv. LXX.
La douleur s'enorgueillist à nous veoir trembler soubs elle
de Michel de MONTAIGNE dans I, 305
Comme un Domitian, pouiveu de telles armes, Des Romains qui trembloient espouvantoit les larmes
de Théodore Agrippa D'AUBIGNÉ dans Tragiques, édit. LALANNE, p. 241

ÉTYMOLOGIE

1
Wallon, trôné ; liégeois, tronler ; Hainaut, trianer ; picard. traner ; Berry, treminer ; provenç. tremblar ; espagn. temblar ; ital. tremolare ; d'un verbe fictif tremulare, tiré du latin tremulus, tremblant, de tremere, trembler.

Synonymes de TREMBLER

Termes proches de TREMBLER

Phonétiquement proche de TREMBLER